Des brins de paille qui picotent à travers le sac de couchage, la lueur des étoiles pour seul éclairage avant un réveil au rythme du lever du soleil: ainsi se résume une nuit champêtre à l'hôtel en plein air de Bad Kissingen.

Conçu comme un labyrinthe dans un champ de céréales, cet hôtel à ciel ouvert du sud de l'Allemagne, unique dans le pays, accueille depuis sept ans des touristes en quête d'une nuit pas comme les autres et des puristes de la nature.

Le confort n'a rien en commun avec celui d'un hôtel traditionnel: pas de chambre, pas de lit. Pas de télévision ni d'internet. Pas de salle de bains, mais une douche bricolée sous un pommier et des toilettes préfabriquées.

«Les clients cherchent à fuir le quotidien et à entrer en communion avec la nature. La plupart sont de la région», dit Monika Fritz, 40 ans, à l'origine de ce concept «romantique, bon marché et aventureux».

Inspirée par une chanson

L'idée lui est venue en écoutant à la radio une chanson intitulée Un lit dans un champ de céréales. C'est en la personne d'Otto Funck, agriculteur et conseiller municipal de 64 ans, qu'elle a trouvé son associé.

Depuis, l'établissement, qui ne fonctionne que deux semaines par an, figure dans la «liste des hôtels les plus fous» du pays.

Pour rejoindre les 19 couches de paille chapeautées d'une toile imperméable, des couloirs ont été taillés dans le triticale, un croisement entre le blé et le seigle.

Pour les lunes de miel ou les noces d'or, il existe une version luxe: une carcasse de lit remplie de paille et ornée d'une moustiquaire.

Histoire d'assurer un minimum d'intimité, chaque emplacement est séparé par une distance de quatre à cinq mètres. Mais sans boules Quies, impossible d'esquiver les ricanements inépuisables des adolescents ou les ronflements des voisins. Ce qui ne semble d'ailleurs gêner personne parmi la trentaine d'hôtes davantage disposés à se concentrer sur les stridulations nocturnes des grillons ou le chant matinal du coq.

Les cheveux blonds ébouriffés au réveil, Wiebke Aszmutat, étudiante de 22 ans, laisse exploser son enthousiasme: «C'était magique et si confortable, j'ai vu mille et une étoiles!» Pleine de courbatures, elle va s'allonger dans un grand bac à pommes de terre tandis que son ami se détend les jambes dans un bassin d'argile, le coin bien-être rustique de l'hôtel.

De son côté, Christian Wohlfart, 27 ans, est plutôt satisfait de son cadeau d'anniversaire: «Je me suis réveillé souvent, car je touchais la paille à chaque fois que je me retournais dans mon sac. Mais j'ai adoré assister aux étapes du lever du soleil.»

Autour du feu de camp éteint, Irene Weiss, 35 ans, s'amuse à moudre des grains de blé avec une pierre. «Bien sûr, on pourrait dormir sur la paille dans la grange de mes parents mais je vous assure, cela n'a rien à voir.» Aussi, après une première expérience d'une nuit l'an dernier elle est revenue cette fois pour une semaine: «Pour les enfants, ici c'est l'idylle, ils vivent dehors librement, toute la journée.»

Activités de plein air

Au programme: balades, baignades dans la rivière Saale, grillades à l'hôtel, qui organise aussi des activités quotidiennes pour les petits écologistes en herbe sur le thème de la nature et remporte un franc succès avec son gigantesque labyrinthe champêtre.

Un groupe d'adolescents y est parti s'y perdre en assommant leur éducateur de questions: «Quel est l'animal le plus rapide, monsieur?», «Vous pouvez nous montrer comment enfiler une capote sur l'épi de maïs?»

Pendant ce temps-là, Otto Funck va faire les chambres: «Il faut aérer la paille pour les prochains clients. Il m'est arrivé d'y retrouver enfouis des lampes de poche, des stylos et même un string», confie cet agriculteur bon vivant.