Tout d'abord, j'aimerais y aller de deux petites précisions à propos de la chronique du 23 décembre, parce que je commence à en faire de l'urticaire. La fameuse histoire du monsieur qui brûle au Népal le jour de Noël et de la montre que je reçois en cadeau («je n'en avais jamais porté auparavant!»), c'était l'histoire d'un vieux Noël. C'est pourquoi vous m'aviez déjà vu avec une montre au poignet, sur des photos antérieures à l'article...

Mais ce qui aurait pu passer, somme toute, comme une coquille dans un grand quotidien, est devenu le véritable enfer du pauvre petit «rapporteur» de voyages que je suis. Depuis un mois, je reçois du courrier haineux! De la part de gens qui croient que je leur ai raconté n'importe quoi. Et ce, depuis 186 samedis! Des lecteurs furieux qui me traitent de MENTEUR!!! À grands coups de points d'exclamation «s'a yeule», des frénétiques qui me déshéritent (oncle Hector, je t'aime!) ou me brûlent en effigie d'El Mimo. Il y a même un maniaque (Nelson H. de Matane, en Gaspésie), qui veut me pendre aux fils électriques haute tension par la peau du scrotum.

Bref, tous des gens normaux avec des boulots respectables, des enfants, un chien même peut-être, qui se sont réveillés un matin et se sont dit :

– C'est assez. Le clown, je lui fais sa fête.

Et moi je réponds :

– Aaaaah... Pourquoi tant de haine? Ce n'est rien qu'une montre, après tout. Une maudite chance que je ne vous ai pas parlé de mon opération au Brésil.

– Pardon? De quelle opération au Brésil?!?!

– Hum... De celle qui s'en vient.

– Quand?

– Ha! Va falloir suivre. Ça va être full samba...

Deuxième petit truc, dans le même dossier, si vous voulez bien. Il semble que plusieurs d'entre vous se demandent pourquoi je n'ai jamais porté de montre. La raison est très simple: c'est parce que j'en ralentis le mécanisme. Jusqu'à stop. Comme mon grand-père, qui ne pouvait porter qu'une montre de poche.

Il paraît que c'est assez commun. Comme ceux qui sentent venir l'orage dans leurs genoux ou ceux qui arrêtent le sang avec leur face. Ce serait une question de magnétisme ou de biorythme, paraît-il, je ne sais pas. Moi, je n'y croyais pas du tout. Jusqu'à ce que je subisse un traumatisme, alors que je n'étais qu'un innocent bout de chou, obéissant au boutte, et premier de classe en deuxième année...

Flash-back?

1971. Papa et maman m'ont offert une montre pour ma fête. Une horrible Cardinal orange et noir qu'on remonte en secouant. Je les remercie, mais je ne suis pas emballé par le cadeau. Pour un petit gars de 7 ans, une f... ing de montre, ça signifie «Hey! Arrête de t'amuser avec tes jouets et va brosser tes dents, parce que c'est l'heure d'aller te coucher!» À 7 ans, le temps est encore la pire invention des parents.

Je pars donc le lendemain pour l'école, montre au poignet et à la sortie des classes, je m'arrête rue Franklin pour embrasser Julie Saint-Jacques (my god, le courriel que je vais recevoir!), puis je rentre à la maison en retard, un fait très inhabituel dans mon cas... Évidemment, on me gronde, mais je tente de me défendre en pointant l'heure sur ma montre. Il y a effectivement une dizaine de minutes de différence entre mon appendice et l'horloge de la maison.

– T'as joué avec les aiguilles? soupçonne ma mère.

– Non! protestai-je (voyez-vous le retour du passé simple?).

– Il faut donc que tu secoues plus le bras pour la remonter, me dicte mon papa.

Calvaire. Cal-vai-re. À 7 ans. Mon papa m'ordonne de secouer le bras et moi, fils obéissant... Ai-je besoin de vous décrire les deux semaines suivantes que j'ai passées, avant que mes parents comprennent le problème? Ostie que j'ai secoué le bras. En géographie, j'ai secoué le bras. En maths, j'ai secoué le bras. Et ma montre était en retard. En français, j'ai secoué le bras. Au lunch, en mangeant mon sandwich, sous la table, j'ai secoué le bras. Et ma montre était toujours en retard.

Une chance que ma mère a finalement fait le lien entre la condition de son père et la mienne! Parce que je serais toujours à Laval, en train de secouer mon poignet sous la table... Au lieu de ça, je suis à Bangkok, et je mange des bibittes.

– Des grosses bibittes, ajouterait Elvis Gratton.