La construction d'un grand barrage hydroélectrique sur le fleuve Yangtsé fait craindre le pire. Mais qu'on se rassure. Même si une partie de ses rives est maintenant engloutie, le paysage du plus grand fleuve chinois demeure grandiose. Une croisière de trois jours permet de s'en rendre compte.

Enfin nous y sommes. Après avoir vu Pékin, Xi'an et Shanghai, nous allons finalement vivre le moment le plus attendu du voyage: découvrir le mythique Yangtsé et ses fameuses Trois-Gorges.

L'excitation est à son comble au moment d'embarquer sur le MV Century Star pour une croisière de trois jours. Le départ a lieu à Yichang, dans la province de Hubei, au sud-est de la Chine. Chacun des membres du groupe de Québécois dont nous faisons partie exprime ses désirs. Et ses craintes aussi. Celles de découvrir un paysage qui a perdu de son charme lors de la construction du fameux barrage hydroélectrique et pour lequel on a dû augmenter le niveau d'eau du fleuve d'environ 175 mètres.

Après une première nuit à bord du bateau de 186 passagers, nous partons à la découverte de ce fleuve, l'un des deux plus importants en Chine, avec le fleuve Jaune. Long de 6400 km, le Yangtsé prend sa source dans le haut plateau de la province de Qinghai, pour se jeter dans la mer de Chine. Il traverse 11 provinces. Notre croisière, qui va d'est en d'ouest, nous fera voir près de 200 kilomètres de cet incomparable paysage.

On atteint la première gorge, nommée Xiling, peu de temps après notre départ le premier matin. C'est la plus longue des Trois-Gorges (environ 75 km). Nous la découvrons par temps brumeux, ce qui ajoute à sa grande beauté. Les sommets des montagnes semblent infinis. Ici et là des maisonnettes plantées dans les pentes abruptes témoignent de la présence de quelques rares habitants, autrefois beaucoup plus nombreux.

Encore sous l'effet du charme, nous arrivons à la hauteur du barrage. Avant de franchir les cinq écluses qui nous permettront de poursuivre notre voyage, nous allons voir de plus près cette colossale réalisation dont les Chinois sont si fiers, mais qui suscitent également beaucoup de questions.

Le deuxième jour, nous découvrons d'abord la gorge Wu, qui fait 45 km. La tranquillité et la volupté semblent avoir trouvé dans ce lieu unique une véritable terre d'accueil. Puis, en après-midi, nous arrivons à la gorge Qutang. Plus petite (elle mesure environ 10 kilomètres), elle sert d'écrin à la ville de Baidi. Ses rochers beige et striés sont à couper le souffle.

De là, nous empruntons de petites embarcations pour naviguer sur les rivières Daning et Madu et pénétrer ensuite, dans une gorge étroite et sauvage. Il n'y a pas si longtemps, des chemins de halage étaient réservés à de jeunes Chinois dont le métier était de tirer avec des cordes des embarcations chargées de marchandises de toutes sortes.

Des musiciens, cachés dans les montagnes, jouent des airs traditionnels. De petits singes sautent de branche en branche. On est ailleurs. Tellement ailleurs.

Conquis et éblouis par tant de splendeurs, nous arrivons le lendemain à Chongqing, point de chute de cette croisière (point de départ pour les voyageurs qui font la croisière d'ouest en est). Les images sont nombreuses. Le choc est puissant. Le désir est grand. Celui d'y revenir un jour.

Un barrage controversé

À la fin de 2009, la Chine inaugurera le barrage des Trois-Gorges. Depuis le début de sa construction au milieu des années 90, il ne cesse de soulever la controverse, mais aussi de susciter une certaine fascination. Une fois en marche, ses 26 générateurs devraient pouvoir fournir 84,7 milliards de kw/h à l'année, ce qui assurera 10 % de la production électrique chinoise.

Malgré les gigantesques ambitions du plus long barrage au monde (il mesure 2235 mètres), les critiques sont nombreuses. Alors que certains dénoncent le nombre astronomique d'expropriations (plus d'un million de riverains chinois ont dû déjà quitter leur habitation), d'autres déplorent les outrages faits à ce trésor naturel qu'est le Yangtsé.

Depuis 2003, le niveau d'eau du célèbre fleuve a été relevé d'environ 150 mètres. Et ce n'est pas terminé. Vingt-cinq autres mètres s'ajouteront d'ici à l'ouverture du barrage. On peut d'ailleurs apercevoir des marques dans les montagnes qui indiquent le niveau que l'eau atteindra au final. Résultat: pas moins de 13 villes et 1500 villages ont été engloutis.

Malgré les promesses du gouvernement, des milliers de sites archéologiques et historiques ont été détruits. Pour les écologistes, l'heure est grave. De nombreuses espèces sont menacées. Certains craignent également que l'immense réservoir créé en amont du barrage ne devienne le plus grand égout de la planète.

Ajoutons à cela les coûts de construction largement dépassés (initialement de 15 milliards de dollars, ils gravitent maintenant autour de 22 milliards de dollars) et les scénarios catastrophes qui pourraient survenir en cas d'attaque terroriste ou de rupture. Dans un tel cas, la ville de Yichang serait engloutie à la vitesse de l'éclair.

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Les frais de ce voyage ont été payés par l'agence Sinorama.