En navigant sur l'internet, on croise beaucoup de frais cachés dans les publicités de voyage.

Prenez cette croisière transatlantique de 30 jours de Barcelone à Fort Lauderdale. Prix affiché : 3040 $. Mais toutes sortes de frais (taxes, surcharge de carburant, frais de port et de transfert) gonflent la facture de 952 $, constate Hélène Lafrance.

«C'est un surplus de presque le tiers du prix annoncé», souligne la consommatrice, qui croyait pourtant que les entreprises devaient afficher un prix total.

Elle a raison... en partie.

Au Québec, les publicités des agences de voyages et des grossistes doivent mettre en évidence le «coût total» du voyage, comme l'exigent les règlements afférents à la Loi sur les agents de voyages.

Le coût total doit inclure tous les frais et les surcharges. Mais il peut exclure la TPS, la TVQ et la contribution au Fonds d'indemnisation des clients des agents de voyages (il faut toutefois mentionner si ces éléments sont compris ou non dans prix total).

À la fin de juin, l'Office de la protection du consommateur a cru bon de faire une mise au point sur le prix total, compte tenu de l'explosion du prix du pétrole.

Évidemment, les voyagistes ont le droit d'augmenter leur prix pour refléter la hausse du coût du carburant. Mais les surcharges doivent être intégrées dans le prix total affiché par les agents.

Ensuite, les prix affichés dans une brochure ne peuvent être augmentés dans les 60 jours suivant sa publication (sauf certaines exceptions), rappelle l'Office.

Enfin, les voyageurs qui ont déjà fait une réservation qui a été acceptée par l'agent de voyages n'ont aucune surcharge additionnelle à payer. Dès que la réservation est faite, un contrat est conclu, peu importe si le client a versé un dépôt ou non. Le prix convenu ne peut pas être modifié par la suite.

Billets d'avion, champions des frais

D'autre part, les transporteurs aériens, qui relèvent de l'autorité fédérale, ne sont pas soumis aux mêmes règles que les agents de voyages. Derrière des prix ridiculement bas, ils peuvent dissimuler tous les frais et les surcharges qu'ils veulent.

Exemple : 39 $ pour un vol Montréal/Toronto. Impossible : ça ne paie même pas l'essence pour faire la route en voiture!

Or, ce prix s'applique au billet retour seulement. Pour le trajet aller, le billet coûte 89 $. La facture s'élève à 128 $. Puis, en additionnant surcharges, frais et taxes, la facture finale grimpe à 305 $. C'est presque 10 fois le prix affiché!

D'un côté, les transporteurs aériens peuvent camoufler une pléthore de frais dans leur publicité. De l'autre, les agences doivent afficher des prix complètement transparents. Deux poids, deux mesures.

«C'est une situation difficilement justifiable quand on veut laisser fonctionner les lois du marché. Ça crée une désinformation qui ne permet pas aux consommateurs de prendre une décision éclairée», déplore Stéphanie Poulin, d'Option Consommateurs.

Pourtant, les amendements apportés à la Loi sur les Transports, en mai 2006, laissaient espérer un changement de cap.

Une disposition donnait le pouvoir au ministre d'établir un cadre réglementaire pour assurer plus de transparence dans la publicité sur les billets d'avion. Mais après des consultations avec l'industrie, le ministre Cannon vient de décider de faire demi-tour. Pas de réglementation.

Cette décision a été vertement critiquée par la Coalition pour la protection des voyageurs, qui affirme, sondage à l'appui, que 93 % des Canadiens sont en faveur d'une telle réglementation.

La Coalition s'insurge : «Les passagers des 80 millions de vols au Canada par année vont continuer de faire les frais du petit jeu des compagnies aériennes qui indiquent un prix dans leur publicité, pour ensuite vendre le billet d'avions plusieurs fois plus cher.»

Les frontières de la loi sur l'internet

Or, la croisière de Mme Lafrance n'a rien à voir avec le débat législatif canadien. En fait, la dame a repéré ce voyage sur un site internet américain. Comme l'entreprise n'a pas d'adresse au Canada, on ne peut pas lui imposer des règles canadiennes, dit Mme Poulin.

En achetant sur l'internet, auprès de commerces étrangers, les consommateurs ne sont pas protégés comme ils le seraient ici. En cas de pépin, ils devront se débrouiller à distance, dans un cadre juridique qu'ils connaissent mal. Est-ce que ça vaut le coût?