Avec des biceps deux fois plus larges qu'un ballon de football et une carrure digne d'un séquoia, Luc Brodeur-Jourdain est l'un des plus massifs porte-couleurs des Alouettes. Face-à-face avec une force de la nature pour qui être gros est un métier à temps plein.

Tu gagnes ta vie avec ta forte taille aujourd'hui. Est-ce qu'être gros a toujours été un avantage?

Pas quand j'étais jeune. À ma première journée d'école, en troisième année, je n'étais pas capable de m'asseoir à mon bureau parce que mes genoux n'entraient pas. Il a fallu qu'on me donne le pupitre d'un élève de sixième année! Dans la cour de récréation, je marchais souvent la tête et les épaules baissées pour être au même niveau que les autres.

Tu ne faisais pas la loi dans la cour d'école avec tes gros bras...

J'ai toujours été un p'tit gars bien tranquille, en effet. C'est comme ça pour tous les gars de la ligne offensive, on est davantage passifs que bagarreurs. C'est une qualité à notre position: pendant un match, l'adversaire nous agresse sur 80 % des jeux. Il faut une grande force mentale pour rester calme et concentré malgré les assauts.

J'imagine que le football était un choix de carrière naturel pour toi?

Non. J'ai seulement commencé à jouer à ma deuxième année de cégep. Avant, j'avais essayé plein d'autres sports, sans succès. Les petits me «clanchaient» au hockey et je ne courais pas assez vite pour le baseball. J'ai même essayé le water-polo, mais j'étais trop massif et je calais tout le temps au fond de la piscine! Je ne flotte absolument pas!

À quoi ressemble un de tes repas? Manges-tu autant que Michael Phelps?

Je mange de grosses portions, mais quand je vais déjeuner au Cora, par exemple, je prends une assiette normale, sans extra. Si on fait une réunion d'équipe avec les gars de la ligne offensive, par contre, c'est autre chose. Ma blonde doit passer deux jours dans la cuisine et demander à ses amies de cuire ses lasagnes, parce que notre four n'est pas assez grand pour tout chauffer en un après-midi. Ça mange beaucoup, des gangs comme la nôtre!

C'est donc vrai qu'il y a une confrérie de gros bonshommes dans une équipe de football?

Oui. Tous les gars de la ligne offensive, on mange, on fait des partys et on voyage ensemble. Quand on entre à sept dans le vestiaire, les autres gars nous niaisent et font des bruits d'animaux, comme si on était un troupeau de gros bétail! Mais ça fait partie du jeu. Ils ont besoin de nous: Anthony Calvillo, notre quart-arrière, nous invite au restaurant au moins une fois par saison pour nous remercier d'être là. Des fois, même, après un bon match les petits porteurs de ballon nous laissent un cadeau dans notre case.

Tu pèses aujourd'hui 317 livres. Est-ce qu'à ta position, plus tu es gros, meilleur tu es?

Pas nécessairement. Être le plus fort et avoir les plus gros muscles ne veut rien dire si tu n'as pas une bonne mobilité. N'importe quel joueur ou entraîneur va te le confirmer: un joueur avec des bons pieds et une bonne technique peut se rendre très loin. Mais c'est sûr qu'il y a un minimum pour jouer sur la ligne offensive. En bas de 6 pieds et 260 livres, tu vas te faire bardasser pas mal!

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