Les beaux jours du minigolf (communément appelé miniputt) semblent loin derrière. Or, pour Carl Carmoni, c'est une passion qui se partage encore au présent. Conversation avec un champion.

La gloire dure parfois bien plus que 15 minutes. Carl Carmoni a goûté à la célébrité il y a plus de 25 ans. Son style expressif et ses performances au Défi mini-putt, alors diffusé à RDS, en ont fait une vedette de la télévision. Son sport a quitté le petit écran il y a longtemps, mais la célébrité, elle, ne l'a pas quitté, lui. « Je signe des autographes tous les jours », assure l'ancien champion.

Sa passion pour le golf miniature ne l'a pas quitté non plus. Carl Carmoni joue encore. Il participe toujours à des tournois. Qu'il organise lui-même depuis 2005. Il joue, bien sûr, avec l'envie de gagner, mais surtout pour former une relève. La formule qu'il a mise sur pied il y a une douzaine d'années permet en effet à des débutants de jouer en équipe avec un joueur d'élite qui, le temps d'un tournoi, leur révèle ses trucs.

« Ce que j'ai voulu faire, c'est remettre du monde sur les terrains, me servir de ma popularité pour publiciser le miniputt », explique-t-il. Son approche semble donner les résultats escomptés : il a comptabilisé 630 joueurs uniques au cours de ces tournois, dont seulement 36 anciens. Ses efforts ont donc permis de former près de 600 nouveaux ambassadeurs du minigolf.

Pour l'amour du sport et l'amour tout court

Carl Carmoni jouait déjà au golf et au baseball lorsque l'arrivée du minigolf à Lachine a piqué sa curiosité en 1970. Il dit y être allé dès l'ouverture. Et il n'y a pas que le jeu qui lui a plu : c'est ce soir-là qu'il a rencontré celle qui allait devenir sa femme, Suzanne. « Il y avait deux filles sur le terrain, j'en ai marié une des deux, raconte-t-il. Je suis encore avec elle 48 ans plus tard ! »

Son succès en amour s'est aussi transposé sur le terrain. « Je me suis aperçu qu'avec de la pratique, tu pognes des trucs pour réussir le birdie, dit-il. Alors en 1970, j'ai embarqué dans des tournois avec 1000 et 2000 $ en bourse. » L'année suivante, il amassait déjà plusieurs milliers de dollars en gains, selon la fiche statistique affichée sur son site officiel.

Les bourses associées aux tournois de minigolf, soutenus financièrement par une grande marque de cigarettes, sont énormes au début des années 70.

« Je faisais trois fois mon salaire en jouant au miniputt. Dans ce temps-là, on faisait à peu près 3000 $ par année et j'allais chercher 10 000 $ en jouant au miniputt. »

- Carl Carmoni

Avec des bourses comme ça - qui équivaudraient à environ 60 000 $ aujourd'hui -, on ne parle plus d'un petit à-côté...

Ses gains au minigolf ont d'ailleurs incité le joueur à quitter l'emploi qu'il occupait durant l'année 1973. Pas de chance : en 1974, le cigarettier a retiré sa commandite. Ce qui a porté un premier dur coup à la popularité du minigolf : fini, les matchs à la télé et les tournois lucratifs. « Après, il y a eu un deuxième souffle de 1986 à 1990, et puis avec Serge Vleminckx et Claudine Douville à RDS à partir de 1990 », raconte Carl Carmoni.

C'est à cette époque que le joueur a connu ses heures de gloire. Il suffit de taper son nom dans un moteur de recherche pour retrouver sur l'internet des extraits des parties qu'il a disputées - et remportées - au Défi mini-putt. En 1991, il a remporté huit victoires de suite - un record, souligne-t-il. L'année suivante, il a remporté la Coupe du président puis, en 1993, il a été sacré champion de la saison à RDS.

Un jeu sérieux

« C'était très sérieux. C'était comme une finale de la Coupe Stanley », dit Carl Carmoni à propos des tournois à RDS. Les bourses - environ 2000 $ - constituaient une grande motivation. « Je ne voulais pas me faire battre », résume-t-il. Pour ne pas perdre la main entre deux tournages, il s'entraînait. Le champion pouvait passer deux ou trois dizaines d'heures sur un terrain de minigolf en prévision d'une compétition.

« De l'extérieur, les gens ne comprenaient pas qu'on passe autant de temps sur un terrain de miniputt pour pratiquer. Ils disaient : "C'est juste du miniputt, c'est pas du golf." Il y a une différence entre jouer pour le plaisir et jouer pour la compétition devant des caméras », fait toutefois valoir le vétéran.

Même s'il a « quasiment acheté » sa maison avec ses gains au minigolf et même s'il a connu une célébrité qui l'étonne et l'amuse encore aujourd'hui, Carl Carmoni a un aveu à faire : « C'est plus plaisant pour moi de jouer en Pro-Am aujourd'hui avec un débutant que devant les caméras. » Il n'a plus rien à prouver. Pas de stress à gérer. Pas d'auditoire à impressionner. Ne lui reste que le plaisir de faire partager ses petits secrets et le bonheur de voir grandir le sport qui le passionne toujours.

Photo Bernard Brault, La Presse

Carl Carmoni joue encore. Il participe toujours à des tournois. Qu'il organise lui-même depuis 2005.