Un couple de femmes qui désire fonder une famille doit se poser plusieurs questions : comment l'enfant sera-t-il conçu ? Qui le portera ? Le donneur sera-t-il connu ou inconnu ? Trois familles racontent comment, au bout d'une longue démarche, leur engagement et leur amour ont grandi.

FADJA ET MARILYN : FAMILLE DE CINQ, BIENTÔT SIX !

Dès le début de leur relation amoureuse, la question de la famille a été abordée. D'abord parce que Fadja Oxime avait déjà deux enfants issus d'une relation précédente. Ensuite parce que Marilyn Vallée désirait profondément porter un enfant.

« J'avais rencontré d'autres femmes avant, mais jamais je n'avais été suffisamment confiante pour les laisser entrer dans ma vie et celle de mes enfants, confie Fadja Oxime, adjointe administrative de 33 ans. Avec Marilyn, je l'ai su tout de suite. C'était écrit dans le ciel que nous allions former une famille. »

Alors que pour ses deux premiers enfants, Fadja avait opté pour l'insémination artisanale (technique de procréation sans intervention médicale qui consiste à injecter du sperme dans l'utérus à l'aide d'une seringue), le couple a privilégié la procréation assistée en clinique de fertilité avec un donneur anonyme. « Cette approche me rassurait et nous permettait de choisir un donneur de race noire, explique Marilyn Vallée, 30 ans. C'était important pour nous que nos enfants soient mulâtres comme leur grande soeur et leur grand frère, pour assurer un sentiment d'appartenance dans la fratrie. »

LA FAMILLE S'AGRANDIT

Très attendu par toute la famille, le petit Loïc est né en 2014. Et, à compter de décembre, une petite fille s'ajoutera au clan tissé serré. Pour Fadja, qui avait donné naissance à ses deux premiers enfants, Alexie et Noah, il était tout à fait naturel que ce soit Marilyn qui porte son troisième.

« Je voulais qu'elle le vive, car c'est tellement beau, fort et puissant ! »

- Fadja Oxime, au sujet de la grossesse de Marilyn Vallée

Or, pour le quatrième, le choix a été plus difficile. « J'aurais souhaité vivre une autre grossesse et Marilyn aurait aimé me voir enceinte, mais elle craignait aussi de regretter de ne pas revivre l'expérience. Comme j'en avais déjà eu deux, mon sens de la justice l'a emporté et Marilyn a repris les démarches de procréation assistée. J'ai dû faire mon deuil d'un accouchement zen, moi qui avais eu deux césariennes. »

GROSSESSE À DEUX

Vivre la grossesse avec sa femme a été une bénédiction pour Marilyn. « J'en ai rendu bien des jalouses au travail et un peu partout, énonce-t-elle. C'était tellement rassurant d'avoir à mes côtés une femme qui était passée par là. Elle a été ma référence pour tous mes petits maux et besoins. Elle était toujours collée sur ma bedaine à parler au bébé. C'est comme si elle avait été enceinte avec moi. »

Avant la naissance de Loïc, Fadja a suivi un traitement médicamenteux pour être en mesure de co-allaiter. « Elle a pu donner le sein à Loïc pendant trois ou quatre mois, souligne "maman-lyn". On les appelait "les petits snacks au chocolat" qui me permettaient d'avoir des pauses entre les grosses tétées. » Le congé de maternité a, lui, été partagé partiellement alors que Fajda a pris les trois derniers mois.

« Je n'ai jamais eu de craintes quant à mon amour pour Loïc, confie Fadja. Avant sa naissance, j'avais plutôt une inquiétude par rapport à son attachement envers moi. La perspective de retourner travailler cinq semaines après sa naissance alors que Marilyn restait à la maison me faisait peur.

« Mais à la seconde où je l'ai tenu dans mes bras, alors qu'il posait sa tête sur moi, ma peur s'est dissipée. La fusion maternelle s'est faite instantanément », dit Fadja Oxime.

FRATRIE HEUREUSE

Alexie, Noah et Loïc se considèrent aujourd'hui comme des frères et soeurs à part entière. Même qu'il n'est pas rare que les plus vieux parlent de Marilyn comme de leur troisième maman. « On nous dit souvent que nous sommes chanceuses de vivre cette maternité partagée, énonce Fadja. Oui, mais non. Il y a les côtés maman lion, maternel et enveloppant qui sont positifs. Mais comme on est mères poules, ça peut devenir lourd. On est deux à trop s'en faire, à décortiquer et interpréter tout. Ce constat nous incite à lire beaucoup sur l'éducation et la psychologie de l'enfant, à aller chercher des trucs pour équilibrer le tout. On essaie notamment de valoriser la relation qu'ont nos enfants avec les individus plus rationnels de notre cercle rapproché. »

Si le rôle de parent est le plus beau, c'est aussi le plus difficile, conclut « maman-loup ».



ÉLIANE ET CAMILLE : POUR L'AVENIR D'HENRI



Donneur à identité ouverte ou fermée ? Les couples qui ont recours à la procréation assistée doivent trancher. Pour Éliane Béliveau-Cantin et Camille Guédon, mamans du petit Henri, la transparence a prévalu. Dans leurs interventions auprès de leur fils de 19 mois, elles ne laissent rien au hasard.

COMMENT EST NÉ VOTRE PROJET FAMILIAL ?

Éliane Béliveau-Cantin, gestionnaire de bibliothèques de 31 ans : « On est ensemble depuis huit ans et le projet d'avoir des enfants est venu tout naturellement, car nous en désirions toutes les deux. Il n'y a pas eu d'hésitation quant à savoir qui allait porter nos enfants. Camille le voulait à 110 %, même qu'elle en voulait quatre ! Ma mère est sage-femme. Je gardais un très beau souvenir de la naissance de mon frère à la maison, mais je n'avais jamais ressenti le désir d'accoucher. »

QU'EST-CE QUI VOUS A INCITÉES À CHOISIR UN DONNEUR À IDENTITÉ OUVERTE ?

Camille Guédon, 29 ans, gestionnaire à la programmation du 375e anniversaire de Montréal : « Ç'a été comme une évidence pour nous de laisser le libre choix à notre enfant plus tard. Ce n'est pas que l'on ne respecte pas les autres options, mais c'était pour nous très clair. Surtout après avoir discuté avec des amis adoptés qui auraient aimé avoir cette option. Henri aura au moins une porte ouverte si, à 18 ans, il ressent le désir ou le besoin d'en savoir plus. »

LE LIEN EST-IL LE MÊME ENTRE HENRI ET SES DEUX MAMANS ?

Éliane : « Le seul lien qui est unique à la mère biologique, c'est l'allaitement, qui crée un attachement fort dès le départ. C'est certainement quelque chose que j'aurais aimé vivre avec lui. »

Camille : « Éliane a été très présente durant les premières semaines de vie d'Henri et a pu créer un lien tôt grâce notamment au peau à peau. Maintenant, il n'y a pas de différence dans le lien d'attachement qu'il a pour chacune d'entre nous. »

ÉLEVER UN ENFANT ALORS QU'ON EST DEUX MAMANS, QU'EST-CE QUE ÇA CHANGE ?

Éliane : « Je ne vois pas de différence. On est deux personnes uniques. Comme tous les parents, on fait notre possible. Une chose que j'observe néanmoins, c'est qu'on est très impliquées dans la vie d'Henri. Nous sommes souvent les deux seuls parents présents aux activités. »

Camille : « Je pense que cette implication s'explique non pas parce qu'on est deux filles, mais parce que le processus de procréation assistée est compliqué et demande beaucoup d'efforts. On doit faire une série de tests et d'examens physiques et psychologiques avant même de commencer les inséminations. Ça doit être la même chose pour les couples infertiles. Le désir d'enfant est tellement grand. Et quand ça fonctionne, on sait qu'on a de la chance et à quel point c'est précieux. »

QUELS SONT LES PRINCIPAUX DÉFIS ?

Éliane : « Le défi, c'est de se faire accepter comme on est. Que Henri ne soit pas catalogué car il est issu d'une famille différente. Les gens nous posent des questions maladroites, comme "qui est le père ?" Dans nos réponses, on essaie de ne pas signifier le manque. On ne dit pas "il n'a pas de père", on dit "il a un donneur et deux mères". »

Camille : « Il faut s'assumer entièrement comme couple, car il faut constamment sortir du placard. Les gens sont curieux de savoir comment s'est faite la procréation, qui est le donneur. Ils sont parfois mal informés, mais ils ne sont pas de mauvaise foi. Avant d'avoir Henri, on s'est demandé si on était prêtes pour ça. Aujourd'hui, on se dit que plus on en parle, plus on fait notre part pour rentrer dans les normes sociales.

« Un jour, notre fils n'aura pas le choix de répondre aux questions à son tour. Notre rôle comme parents, c'est de l'outiller et de lui montrer que notre situation familiale est tout à fait normale. Le plus important, c'est qu'il soit bien là-dedans. »

DES SUGGESTIONS DE LIVRES DE MAMAN ÉLIANE

Ulysse et Alice

Ariane Bertouille et Marie-Claude Favreau

Éditions du Remue-ménage

2006

Le safari de Zak

Christy Tiner

LARA ET CAROLINE : FUSIONS MATERNELLES

Respectivement Brésilienne et Française d'origine, Lara et Caroline se sont rencontrées dans une boîte de nuit. Le coup de foudre a été instantané. Ce n'est que quelques années plus tard, alors qu'elles vivaient au Québec, qu'elles se sont senties prêtes à fonder une famille. La plus belle des aventures, qui a nécessité un don de gamètes et un don d'ovules.

RÉFLEXION MÛRIE

Lorsqu'elles construisaient leur idée de la maternité, Lara et Caroline* se sont posé plusieurs questions, notamment quant aux impacts de leur projet familial sur elles, leurs enfants et leur famille respective. « C'est une réflexion que l'on a mûrie longtemps avant d'aller chercher de l'aide médicale dans une clinique de fertilité, explique Lara, orthophoniste de 42 ans. On voulait s'assurer d'être préparées pour parler de nos choix de manière cohérente à nos enfants un jour. »

GROSSESSE DE RÊVE

Comme la carrière de Lara était en pleine ascension, il a été décidé que Caroline porterait le premier enfant. Elles ont sélectionné un donneur anonyme, ce qui veut dire que son identité demeurera inconnue. Il a suffi de deux inséminations avant qu'elles apprennent la venue de leur première petite fille. « C'était le bonheur absolu ! s'exclame Lara. On a eu beaucoup de chance ! » La grossesse de Caroline a été idyllique. « Neuf mois de bonheur ! illustre Caroline, directrice marketing de 35 ans. Lara était en mode cocooning, aux petits soins, elle me préparait des petits plats sains à manger. On partageait tout. C'était une vraie découverte pour nous ! »

UN DON DE VIE

Comme le processus de procréation assistée est long, Lara entreprend dès lors les démarches à son tour. Au bout de deux ans et demi d'échecs répétés, elle apprend qu'elle est stérile. « Tout s'est effondré, raconte sa conjointe. Ç'a été très dur. Deux options s'offraient alors à nous : adopter ou que je porte le deuxième enfant. Or, je ne voulais pas enlever cette chance à Lara. » Le médecin propose au couple une troisième option inattendue : le don d'ovocytes. Le choix est apparu aussitôt à Caroline comme la meilleure chose à faire. Sans perdre un instant, elle a entrepris les traitements de stimulation ovarienne pour le prélèvement de ses ovules. À la première tentative de fécondation in vitro, Lara attendait leur deuxième fille.

COMPLICITÉ DÉCUPLÉE

« Caroline a accouché en rigolant, raconte Lara. Je ne pensais jamais voir ça de ma vie. La petite est sortie au rythme de ses éclats de rire. Dès qu'on a posé la petite sur elle, je me suis mise à pleurer. J'étais tellement émue. Pendant un court instant, la question m'a traversé l'esprit : allait-elle m'aimer ? » « Après, tu t'occupes de ton enfant et les liens se tissent tout seuls », poursuit Caroline.

La grossesse et l'accouchement de Lara ont été plus difficiles. Le bonheur, lui, est demeuré complet. « C'était vraiment extraordinaire de voir, même à l'échographie, que le bébé ressemblerait à Caroline et à sa grande soeur ! », s'exclame Lara.

Chose certaine, fonder une famille a décuplé leur complicité, constate Caroline. « Les nuits, on était deux à se lever, à se soutenir. »

FRANCE ET BRÉSIL

Comblées, les deux mamans ont tenté de déclarer leurs filles à leur ambassade respective. Au consulat français, Caroline a pu faire reconnaître une seule enfant, soit celle qu'elle a portée. L'autre parent a été désigné comme « père inconnu ». « En France, les lois ne reconnaissent pas le parent qui n'a pas porté l'enfant, précise la maman française. Socialement, il y a encore beaucoup de discrimination, de jugements. » Au Brésil, où la filiation est reconnue, Lara a pu déclarer ses enfants, mais la démarche a été longue et ardue : « Les lois brésiliennes protègent les couples, mais l'acception sociale demeure fragile dans certaines régions », affirme-t-elle.

TRANQUILLITÉ D'ESPRIT

À l'origine, le couple n'a pas choisi le Québec pour avoir des enfants, mais en raison de la carrière universitaire de Lara. « Un retour en Europe était prévu, explique Caroline. On a décidé de rester pour notre famille, car on s'y sentait protégées. »

« Au départ, nos familles étaient inquiètes que l'on soit en danger, énonce Caroline. Elles sont maintenant rassurées et ne veulent plus que l'on rentre. »

*Lara et Caroline ont préféré taire leur nom de famille.

FAMILLES LESBOPARENTALES : DES ACQUIS ET DES DÉFIS

En 2002, la réforme du Code civil a accordé aux parents de même sexe les mêmes droits qu'aux couples de sexe opposé. Où en sont les familles lesboparentales 15 ans plus tard ? La directrice générale et fondatrice de la Coalition des familles LGBT Mona Greenbaum et la professeure et chercheuse au département de travail social de l'UQO, Isabel Côté, font le point.

LE QUÉBEC EST-IL UN BON ENDROIT POUR FONDER UNE FAMILLE LGBT ?

Mona Greenbaum : « Le Québec est perçu comme La Mecque pour les familles LGBT en raison de la reconnaissance sociale et de nos lois qui ont été changées bien avant d'autres juridictions dans le monde. Au sein de la Coalition, il y a notamment plusieurs immigrés français. La réforme du Code civil a permis de reconnaître que le projet parental concerne tout le monde. Ce n'est plus le facteur génétique qui est reconnu, mais le désir et le projet de fonder une famille ensemble. »

QUELLES SONT LES DIFFÉRENTES MANIÈRES POUR LES COUPLES LESBIENS DE FONDER UNE FAMILLE ?

Mona Greenbaum : « Elles sont les mêmes depuis 2002 : la procréation médicalement assistée, la procréation maison (ou artisanale), l'adoption ou la coparentalité. Ce qui change avec le temps, c'est la popularité de chacune. Par exemple, entre 2010 et 2015, alors qu'elle était couverte par la RAMQ, la procréation assistée était très populaire. Maintenant qu'elle est payante, on voit de plus en plus de femmes retourner aux inséminations maison avec un donneur connu (à l'aide d'une seringue et d'un don de sperme frais). Il y a aussi l'adoption publique avec les centres jeunesse du Québec, mais il y a peu d'enfants adoptables au Québec. On parle de coparentalité lorsque deux personnes ou plus, qui ne sont pas dans une relation amoureuse, élèvent un enfant ensemble. »

COMMENT SE PREND GÉNÉRALEMENT LA DÉCISION DE PORTER OU NON L'ENFANT ?

Isabel Côté : « Une des principales motivations est le désir de vivre la maternité biologique. Dans certains couples, il y a une conjointe qui veut être mère sans désirer enfanter comme tel. Lorsque le désir de maternité biologique est partagé entre les deux conjointes, la décision repose souvent sur des considérations pragmatiques, comme l'âge ou les conditions de travail. Parfois, la décision est influencée par des problèmes de fertilité également. Dans d'autres cas, les conjointes essaieront de concevoir en même temps jusqu'à ce que l'une d'elles tombe enceinte. »

LES MÈRES BIOLOGIQUES ET LES MÈRES SOCIALES SE PERÇOIVENT-ELLES DIFFÉREMMENT ?

Isabel Côté : « Les mères entrent elles ne font pas de différence. Les enfants non plus. Toutefois, à cause des représentations sociales privilégiant les liens biologiques, il peut arriver que certaines mères non biologiques se questionnent quant au lien d'attachement de leur enfant envers elles, notamment. Dans mes recherches, j'ai rencontré des femmes qui avaient ce type d'inquiétudes avant la naissance et qui en riaient cinq ans plus tard en se disant : "Franchement, il n'y avait rien à craindre !" »

COMMENT ABORDENT-ELLES LA TIERCE PERSONNE DANS LE PROJET FAMILIAL ?

Isabel Côté : « Il y a autant de réponses qu'il y a de couples. Dans la plupart des familles lesboparentales, cette personne n'est pas évacuée de la conversation. Elle fait partie de la genèse de l'enfant. D'ailleurs, les enfants savent très tôt qu'il a fallu une aide extérieure pour les avoir. La plupart les désignent comme le donneur ou le géniteur. Dans le cas d'un donneur relationnel, il arrive que celui-ci ait un rôle qui s'inscrit dans un système de parenté périphérique. Certains le désignent comme le tonton spécial, sans qu'il soit pour autant reconnu comme un père. Dans d'autres situations, il est désigné comme le papa, mais sans qu'il soit reconnu légalement comme tel [parce qu'au Québec, un enfant ne peut avoir plus de deux parents légaux]. »

QUELS SONT LES ENJEUX QUI SUBSISTENT ?

Mona Greenbaum : « L'écho de nos familles, c'est qu'elles ne vivent pas beaucoup d'homophobie, mais de l'hétérosexisme. Elles se butent à la présomption que leur enfant a un père et une mère alors qu'il y a pourtant tellement de modèles familiaux aujourd'hui : monoparental, recomposé, homoparental, adoption... Il y a toujours de la sensibilisation à faire. À la Coalition, on travaille en partenariat avec le ministère de la Famille pour aller notamment dans les CPE et les organismes communautaires familiaux afin qu'ils soient inclusifs et donnent de la visibilité aux différents modèles. C'est important pour nos enfants.

En revanche, une grande majorité de couples de même sexe envisagent maintenant la possibilité de fonder une famille alors que ce n'était pas forcément le cas il y a 20 ans. Aujourd'hui, il y a autour d'une lesbienne sur cinq qui devient mère. Je crois que cela découle d'une plus grande visibilité, notamment à travers des modèles positifs, comme Ariane Moffatt et sa conjointe. »

Familles LGBT

Le guide

Sous la direction de Mona Greenbaum

Éditions du Remue-Mémage

2015