Les adolescents américains ont environ trois ans de retard sur leurs semblables des années 1970 quand il s'agit de relations sexuelles, boire de l'alcool ou trouver un petit boulot, ce qui marque une véritable évolution culturelle, selon une étude diffusée mardi.

Publiée dans la revue spécialisée Child Development, cette étude a examiné la façon de vivre des 13-19 ans en analysant sept grandes études au niveau national réalisées de 1976 à 2016 et ayant porté sur plus de huit millions de jeunes.

Les adolescents d'aujourd'hui sont «moins enclins que ceux des décennies précédentes à travailler, conduire, avoir une copine ou un copain, boire de l'alcool, sortir sans leurs parents et faire l'amour», constate l'étude.

Ainsi de 1976 à 1979, 86% des lycéens étaient déjà sortis avec quelqu'un comparativement à 63% entre 2010 et 2015.

La proportion de ceux qui avaient eu des relations sexuelles est tombée de 54% en 1991 à 41% en 2015, selon les Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC).

La tendance est similaire pour la consommation d'alcool. Le taux des adolescents qui avaient déjà bu des boissons alcoolisées a chuté de 93% entre 1976 et 1979 à 67% depuis 2010.

Enfin, la proportion des 13-19 ans qui avaient déjà gagné de l'argent en travaillant est passée de 76 à 55% sur la même période.

Ces changements sont observables dans toutes les régions des États-Unis et quels que soient la race, le genre ou la catégorie socio-économique.

«Les adolescents grandissent moins vite qu'avant», conclut Jean Twenge, professeure de psychologie à l'Université de San Diego, principale auteure de ces travaux.

Surprotection

«En termes d'activités adultes, les jeunes d'aujourd'hui de 18 ans ressemblent à ceux qui avaient 15 ans avant», ajoute-t-elle.

L'étude estime que l'augmentation «importante» du temps passé en ligne pourrait être un facteur clé de cette évolution.

Cela ne peut en revanche être attribué à une augmentation des devoirs ou des activités extra-scolaires, le temps leur étant consacré a «diminué chez les collégiens et reste inchangé chez les lycéens et les jeunes étudiants», explique l'étude.

Ces jeunes pourraient en fait avoir moins d'intérêt dans ces activités car dans la société actuelle ils n'en ont plus besoin, explique la professeure Twenge.

Selon une théorie de psychologie évolutionniste, le rythme d'évolution de la vie d'une personne s'accélère ou se ralentit en fonction de son environnement.

Ainsi des expériences difficiles et imprévisibles peuvent accélérer le développement d'un jeune alors qu'un environnement plus stable et sécurisant peut avoir l'effet inverse, explique l'étude.

Il y a un siècle, avec une espérance de vie plus courte et une formation universitaire plus rare, «l'objectif était la survie et non pas des leçons de musique dès 5 ans», note la professeure Twenge.

Dans ce contexte, un garçon dès l'adolescence devait songer plus sérieusement au mariage, à conduire une voiture et à travailler pour s'assurer des ressources.

La professeure Twenge estime également que ce retard à devenir adulte pourrait commencer plus tôt avec la tendance grandissante des parents à ne pas laisser leurs jeunes enfants marcher seuls pour aller à l'école ou jouer sans surveillance.

Ces dernières années, les parents restreignent l'indépendance des enfants et les lois dans certains États américains leur ont emboité le pas en leur interdisant d'être seuls dans la rue ou de rester à la maison sans la présence d'un adulte.