Tous éduqués en 2015? Mission non accomplie, malgré des progrès, relève jeudi l'UNESCO, selon laquelle plus d'un tiers (36%) des enfants non scolarisés dans le monde vivent dans des zones de conflit.

Quinze ans après le lancement de l'initiative l'Éducation pour tous (EPT) par 164 pays à Dakar, seul un tiers des pays a atteint les objectifs fixés en 2000, selon le rapport annuel de suivi réalisé par l'organisation internationale.

Parmi eux des pays européens, mais aussi le Kirghizstan, la Mongolie et Cuba. À l'inverse, loin des objectifs, on retrouve plusieurs pays d'Afrique subsaharienne, le Pakistan ou le Yémen.

L'objectif phare, scolariser tous les enfants en âge d'aller à l'école primaire n'a été atteint que par la moitié des pays (52%), tandis que 10% s'en rapprochent, 29% en sont loin et 9% très loin, précise l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), un mois avant un Forum mondial de l'éducation à Incheon (Corée).

Un tiers des enfants privés d'école vivent dans des zones de conflit, phénomène qui s'est aggravé depuis l'an 2000 et dans lequel les filles sont particulièrement vulnérables, s'alarme l'UNESCO.

En Syrie, certains craignent que la crise aboutisse à une «génération perdue». Fin 2013, 2,2 millions d'enfants syriens en âge d'aller à l'école sur 4,8 millions n'étaient pas scolarisés, de même qu'un demi-million d'enfants réfugiés en Égypte, Irak, Jordanie, Liban et Turquie, précise l'UNESCO.

Le Nigeria, où plus de 200 lycéennes ont notamment été kidnappées il y a un an par le groupe islamiste Boko Haram, est le théâtre d'attaques contre les établissements scolaires.

Mais contre toute attente, certains pays ont réalisé d'énormes progrès, comme la Sierra Leone, qui après onze ans de conflit a réussi depuis 2005 à diviser par deux le nombre d'enfants qui n'étaient jamais allés à l'école, tout en réduisant le travail des enfants.

Gratuité pour tous 

En quinze ans, «le monde a réalisé d'importants progrès», selon la directrice générale de l'UNESCO, Irina Bokova, «des millions d'enfants en plus sont scolarisés par rapport à ce que laissaient augurer les tendances des années 1990». Le nombre d'enfants et adolescents non scolarisés a diminué de 84 millions, dont 52 millions de filles.

Différentes politiques ont permis ces «progrès»: abolition des frais d'inscription (Éthiopie, Ghana, Kenya, Malawi, Tanzanie, Burundi et Ouganda), campagne audiovisuelle pour l'éducation des filles (Tadjikistan), construction d'écoles (Mozambique), repas à l'école (32 pays d'Afrique subsaharienne).

«Mais la tâche est loin d'être accomplie. Il nous faut des stratégies spécifiques, bien financées, qui donnent la priorité aux plus pauvres - en particulier les filles - , qui améliorent la qualité de l'enseignement et réduisent le fossé de l'alphabétisation afin que l'éducation devienne vraiment universelle», ajoute Mme Bokova.

En 2015, il reste 57 millions d'enfants et 63 millions d'adolescents non scolarisés. Les plus pauvres ont une probabilité quatre fois plus importante de ne pas aller à l'école que les plus riches.

La proportion d'adolescents qui continuent à travailler parallèlement à leurs études secondaires «reste élevée», s'inquiète l'UNESCO.

Un adolescent sur trois termine le collège 

L'objectif de diviser par deux la proportion d'adultes analphabètes n'a été atteint que par un quart des pays, tandis que 19% s'en rapprochent. Deux tiers des adultes analphabètes sont des femmes.

La parité et égalité entre les sexes sera atteinte cette année dans 69% des pays en primaire et 48% dans le secondaire, mais «mariages et grossesses précoces continuent de freiner les progrès éducatifs des filles».

Il faudrait maintenant débourser 22 milliards de dollars supplémentaires par an pour financer l'éducation pour tous à l'horizon 2030, estime l'organisation onusienne.

Même si 38 pays ont augmenté d'un point de PIB ou davantage les sommes consacrées à l'éducation, «le financement reste l'obstacle principal à tous les niveaux», insiste-t-elle, soulignant que les donateurs n'ont pas tenu leurs engagements.

«Les gouvernements doivent consacrer 15% à 20% de leurs budgets nationaux à l'éducation, et les donateurs multiplier leur aide au moins par quatre», plaide-t-elle.

Au rythme actuel, il faudrait attendre la fin du siècle pour que tous les adolescents fréquentent la première partie de l'enseignement secondaire. Actuellement, seul un adolescent sur trois termine le collège dans les pays à faibles revenus.