Trois femmes transsexuelles en Malaisie ont remporté vendredi une victoire «historique» devant la Haute cour de justice qui a infirmé un jugement interdisant aux hommes de s'habiller en femmes dans ce pays conservateur d'Asie du Sud-Est, à majorité musulmane.

La cour de Putrajaya a estimé qu'une loi islamique imposant cette règle était inconstitutionnelle et «privait les requérants du droit de vivre dans la dignité», soulignant qu'une telle disposition était «oppressante et inhumaine».

Les juges de la plus haute juridiction du pays ont ainsi infirmé un jugement rendu en 2012 par un tribunal qui avait estimé que les trois musulmanes transsexuelles étaient nées hommes et devaient par conséquent s'habiller en hommes. Les trois avaient saisi le tribunal après leur interpellation il y a quatre ans en vertu de cette loi dans l'État du Negri Sembilan (sud).

La Malaisie, ancienne colonie britannique, a des tribunaux civils basés sur la loi britannique, mais aussi des tribunaux de la charia qui régulent l'adhésion aux pratiques islamiques et ne s'appliquent qu'aux musulmans. La charia interdit aux hommes de s'habiller en femmes, un délit passible d'une peine allant jusqu'à trois ans de prison ferme.

L'avocat des requérantes, Aston Paiva, a estimé que l'arrêt de la Haute cour de justice pourrait désormais être invoqué pour contester toute interpellation de transsexuels en Malaisie.

«C'est assez historique. Cela va être un précédent. Cette cour surpasse toutes les autres juridictions», a-t-il déclaré.

«Je suis contente d'avoir gagné», a déclaré à l'AFP l'une des trois transsexuelles, ajoutant avoir attendu longtemps avant d'obtenir gain de cause.

L'ONG Human Rights Watch (HRW) avait indiqué dans un rapport publié fin septembre que les transsexuels en Malaisie faisaient l'objet d'une répression systématique, de harcèlement et de mauvais traitements qui s'inscrivent dans «l'islamisation» de ce pays.

Les Malais musulmans représentent environ 60% de la population de cet État de quelque 30 millions d'habitants, où la pratique de l'islam est historiquement modérée. Mais des minorités religieuses et autres critiques se disent de plus en plus inquiets de l'augmentation des attitudes conservatrices dans l'application de l'islam, religion d'État.