À l'issue d'un mariage expédié en deux coups de cuiller à pot, André Fontaine n'a pu s'empêcher d'émettre ses critiques sur le manque de décorum de la cérémonie: «Les lèvres de la célébrante ont bougé pendant 10-15 minutes. Ensuite, les mariées ont signé le livre et c'était fini. Par la suite, j'ai assisté à deux mariages qui ressemblaient à ça. Mes enfants et mon chum m'ont alors dit que, plutôt que de me plaindre, je devrais devenir officiant.»

C'est ce qu'il a fait il y a deux ans. Depuis, il a marié plus de 100 couples, à Gatineau et Ottawa, dont environ 10% du même sexe, et aussi quelques transsexuels.

Qui célèbre les mariages entre conjoints homosexuels? Selon l'étude Les mariages au Québec en 2010, publiée par l'Institut de la statistique, la reconnaissance du mariage gai a contribué à l'essor de la fonction de célébrant. Outre les greffiers des palais de justice, les notaires et toute autre «personne désignée» par le ministre de la Justice du Québec peuvent agir à titre de célébrant. Il peut s'agir d'un maire ou d'un fonctionnaire municipal, mais aussi d'un ami ou d'un membre de la famille du couple.

En 2010, 80,5% des unions entre conjoints de même sexe étaient des mariages dits «civils» (contre 45% chez les hétéros.)

À Montréal, Bernard Cantin, qui a quitté les ordres romains pour fonder Le Nouveau Penser, organisme non confessionnel, a formé depuis 2004 une cinquantaine de célébrants. «Je suis le pont entre l'ancien et le nouveau, entre le côté métaphysique et l'humain», dit celui qui affirme être là «non pas pour inventer des rituels, mais pour combler des besoins».

«Des mariages, j'en ai célébré partout. Avec les gais, c'est toujours le sommet de la classe.»

André Fontaine affirme célébrer des mariages «non pas religieux, mais spirituels». «On ne parle pas de Dieu, on parle de la spiritualité. C'est différent. On aborde le sentiment d'appartenance parmi les autres, la nature, l'esprit. Beaucoup veulent avoir des fleurs, des rituels. S'ils sont de tradition autochtone, ils aiment intégrer la notion du cercle. La plupart des couples de gais et de lesbiennes aiment la symbolique du noeud: ils se prennent les mains et font le signe d'oméga, qui symbolise le cycle de la Lune et du Soleil, de l'éternité, de l'unité...»

Rejetés par plusieurs religions, les gais s'approprient les rituels. Sauveront-ils l'institution du mariage?