Arrêter de travailler pour élever ses enfants est loin d'être toujours un choix pour les mères, qui doivent arbitrer entre carrière, enfants et image de soi, sans toujours trouver un équilibre personnel, selon deux études publiées cette semaine.

En France, le congé parental, qui permet de suspendre son activité sans rompre son contrat de travail, est à 94% pris par la mère. De trois ans maximum, il peut être rémunéré jusqu'à 566 euros (707 $CAN) mensuels.

En 2007, 57% des mères ayant au moins un enfant de moins de trois ans non scolarisé travaillaient, soit vingt points de moins que l'ensemble des femmes de 25 à 45 ans, rappelle une étude publiée jeudi par l'Insee.

Premier constat, «la cessation d'activité est loin de résulter systématiquement d'un choix», écrit l'auteur Bénédicte Galtier, qui relève que «42% des mères devenues inactives auraient souhaité continuer à travailler» mais que plusieurs paramètres, et pas seulement le nombre et l'âge des enfants, ne leur ont pas laissé le choix.

«Les mères qui ne travaillent plus sont nettement moins diplômées que les mères qui travaillent toujours, mais davantage que les mères qui n'ont jamais travaillé», note Mme Galtier, qui ajoute qu'elles étaient plus souvent en contrat précaire et dans des emplois peu qualifiés.

Mais «ce qui détourne le plus les mères de l'emploi est, toujours toutes choses égales par ailleurs, l'absence de conjoint combinée à un faible niveau de vie».

«Faire la vaisselle c'est pas très fun»

Car ces mères sont dans «l'impossibilité de partager les responsabilités familiales avec un conjoint» et les dépenses de garde d'enfant. Elles estiment aussi parfois qu'elles percevront des prestations sociales «dont le montant sera probablement proche du salaire» antérieur.

Même si 58% des mères inactives disent avoir choisi d'arrêter de travailler, 19% d'entre elles reconnaissent que cesser de travailler était financièrement plus intéressant.

Cela «illustre l'intrication des choix et des contraintes qui aboutissent aux situations d'inactivité», résume Mme Galtier.

Une autre étude, dans la revue des Allocations familiales, note que la cessation d'activité peut être plus ou moins bien vécue, ce qui aura une influence sur la reprise d'un travail.

Soulignant que les mères doivent «composer avec quatre normes sociales difficilement conciliables, voire concurrentes (réalisation de soi, disponibilité maternelle, harmonie familiale et implication professionnelle)», l'étude observe que le congé parental rémunéré pourrait les soulager.

Mais, paradoxalement, cela «ne simplifie pas forcément les choses».

D'une part, la norme «la plus valorisée», le travail, est «abandonnée». Certaines aussi «assument mal d'être rémunérées» pour rester chez elles et compensent par «un surinvestissement» domestique.

Et cela «n'est jamais complètement satisfaisant» car ce fonctionnement pèse sur «l'épanouissement personnel». L'une des femmes interrogées se dit «piégée» et avoue souffrir du «décalage» avec son entourage.

«Faire la vaisselle, c'est pas très fun», résume une autre.

Au bout du compte, selon l'étude, «le congé peut être contreproductif et déboucher sur un renoncement à l'emploi ou une acceptation du déclassement social» car «la confrontation au monde professionnel paraît tout à coup insurmontable».

«Contraintes existantes et exigences nouvelles se conjuguent pour rendre, dans les faits, le retour au travail plus qu'aléatoire».

Le congé parental «finit par constituer une trappe à inactivité», admet la ministre des Droits des Femmes Najat Vallaud-Belkacem, qui souhaite améliorer le dispositif.