Hyperconnecté à l'internet et ultraflexible, néo-dandy féru de luxe discret ou apôtre de la lenteur? Les publicitaires et sociologues tentent de discerner les descendants du métrosexuel, l'archétype désormais dépassé de l'homme des années 90.

Anticiper le profil de l'homme de demain est un enjeu capital pour les grandes marques. En 1994, le terme «métrosexuel», une contraction de «métropolitain hétérosexuel», résumait la tendance: urbain, sophistiqué et prêt à dépenser ce qu'il faut pour soigner son apparence.

Trouver ce qui fera la tendance de demain, c'est le travail de décryptage d'un cabinet comme Peclers Paris. «On a toujours défié le modèle du métrosexuel, comme trop réducteur,» explique Emma Fric, directrice de recherche et prévision dans ce cabinet dont les clients sont Microsoft, Sony, Reebok ou BMW.

Elle propose une série de descendants à cette figure synthétique, mais un peu trop simpliste, de l'homme des années 90, avec trois grands types «d'homo urbanicus» pour le 21e siècle.

Il y a d'abord un groupe d'hommes âgés de 15 à 30 ans, une génération hyperconnectée qui ignore l'époque d'avant internet. Il s'agit d'hommes pour qui la «flexibilité» est un véritable mode de vie, selon Mme Fric. Parmi ceux-là, nombre auront une carrière à «slash», un terme découlant du recours au signe slash sur les cartes de visite des pigistes polyvalents. Par exemple: «musicien/designer/consultant».

Leurs goûts sont kaléidoscopiques, avec une approche de la mode et l'esthétique qui tient du phénomène de détournement culturel, version moderne et légère de la contre-culture des années 70/80. Ils ont grandi avec les jeux vidéo et s'attendent à s'amuser en tant que consommateurs.

Tout comme les «métrosexuels», ces jeunes sont prêts à dépenser beaucoup pour un costume, un soin corporel ou un gadget technologique, mais ils ne se prennent jamais trop au sérieux.

L'humour est un élément important: goût de la plaisanterie absurde et du comique d'auto-dérision comme le montrent leurs vidéos potaches circulant sur le web.

Silence et luxe tranquille

Comme toute jeune génération, ils contestent le système, mais croient possible le changement de l'intérieur, utilisant par exemple de nouvelles formes de consommation avec les achats groupés ou menant des actions de pression collective sur le web.

Il y a un deuxième groupe d'hommes plus âgés, souvent plus riches qui cultivent l'individualisme, le silence et le luxe tranquille.

«Ce sont des hommes qui disent: «les réseaux, c'est très bien, mais qu'en est-il de ma vie privée, de l'individu?», indique Mme Fric.

Beaucoup sont anticonformistes, avec un côté «dérangeant, subversif, hors cadre». Certains tentent de recréer le secret dans un monde où tout se retrouve sur les écrans, comme en témoigne l'insaisissable groupe des pirates du web «Anonymous», qui ont perturbé le fonctionnement de sites comme ceux du FBI ou d'Amazon en les saturant de connexions.

Ce sont des gens qui préfèrent aller incognito et «s'imposer sans faire de bruit, dans une forme d'éloge de la sobriété», explique Mme Fric.

«Less is more» --c'est le nom d'une nouvelle gamme de cosmétiques pour hommes-- pourrait être leur devise, un concept qui passe par un design minimaliste associé à des performances maximales.

Troisième catégorie: l'homme qui tente de concilier nature et société moderne. «C'est une forme de masculinité renforcée par une dimension spirituelle, par un lien avec le monde naturel», indique Mme Fric.

Des marques de luxe s'inspirent de cette tendance. Exemple la montre Hermès peut être «arrêtée» pour permettre à son propriétaire de souffler quelques heures.

Attentif à l'écologie, cet homme appréciera par exemple ces baskets avec graines intégrées dans la semelle qui deviendront des arbres après usage.