Les Irlandais, inventeurs de la bière Guinness et de la Riverdance, cultivent des traditions franchement festives et un peu décalées. Le 6 janvier, jour de l'Épiphanie, les dames irlandaises envahissent les pubs et y restent jusqu'aux petites heures pour célébrer le «petit Noël des femmes» (Women's Little Christmas). Le Nollaig na mBan est né à l'époque où les familles nombreuses étaient la norme en Irlande et que les mâles ne levaient pas le petit doigt dans la maisonnée. La récompense offerte aux femmes, exténuées au lendemain des fêtes de fin d'année: une journée où leurs maris leur donnaient congé de tâches ménagères, et pendant laquelle tous les excès festifs étaient permis.

Certes, il reste ici quelques fêtards respectueux des traditions pour clore la saison du sapin de Noël avec une galette des rois et des couronnes. Mais avec toutes ces pubs de gyms, de «rabais monstres» d'après Noël ou de régimes amaigrissants qui envahissent l'espace public dès le 2 janvier, le début de l'année a toujours des airs de lendemain de veille brutal et un peu... drabe.

À l'instar des femmes irlandaises qui font revivre Noël à l'Épiphanie, pourquoi ne pas trouver des motifs de réjouissance toute l'année durant? C'est ce que propose l'ouvrage Happy, petites leçons de bonheur venues du monde entier, publié par les éditions Lonely Planet (oui, les mêmes qui font les célèbres guides de voyage).

Dans les 125 pages joliment illustrées, on trouve une foule de petites et grandes leçons de sagesse (et de plaisir!) qui s'accomplissent par l'entremise de rituels festifs exubérants, inspirants, farfelus ou carrément déjantés, qui proviennent de partout dans le monde.

Novembre, apparemment, est un temps fort pour les célébrations de tout acabit, en Thaïlande, au Mexique comme en Italie.

À Rocca Canterano, près de Rome, c'est pendant ce sinistre mois que l'on célèbre la Festa del Cornuto (fête des cocus), une occasion aussi cocasse que cruelle, «une fête en l'honneur de ceux qui ont eu la malchance d'être trompés par leur partenaire». Ce jour-là, les éplorés amoureux sont invités à faire preuve d'autodérision en applaudissant le spectacle d'acteurs défilant dans les rues, qui racontent des histoires d'amour tragiques, de trahisons et de ruptures, sur un mode humoristique.

À peu près au même moment, au Mexique, on souligne la «fête des véritables chercheurs de danger intrépides», en l'honneur des «muxes», une catégorie comprenant les gais et transsexuels, qui sont considérés comme «une bénédiction pour leurs familles et sont admirés pour leur beauté et pour leurs talents domestiques». Dans le nord de la Thaïlande, pendant ce temps, on souligne le Loy Krathong, une fête où l'on lâche de petits bateaux décorés sur les rivières ou les étangs, symboles de toutes les petites contrariétés accumulées que l'on laisse partir au loin...

Il y a aussi les Bhoutanais qui, on le sait, valorisent la félicité personnelle au point d'avoir créé un «indice national de bonheur brut». Et bien entendu les Brésiliens, qui célèbrent la vie dans la folie et l'exubérance pendant le carnaval, en février.

Les symboles et les prétextes pour faire la fête ont beau varier, la nature humaine est universellement festive, illustre cet ouvrage ludique et philosophique qui nous rappelle que si les Japonais sont happy sur scène en faisant du karaoké, les Balinais trouvent la joie dans le silence, le jour du Nouvel An du calendrier lunaire.

Mais aujourd'hui, les Irlandaises sont reines, pour 24 heures de Happy Hour. On leur lève notre pinte de Guinness...