En 2012, c'est décidé. On va enfin user nos espadrilles au gym, cesser de laisser l'argent nous brûler les doigts, apprendre l'italien, cuisiner les recettes que l'on voit chaque semaine à Ricardo et faire trois heures de bénévolat hebdomadaires. Ah oui?

Après avoir pris d'excellentes résolutions, une fois de plus, aux environs de la mi-février, le sentiment d'échec commencera à nous gagner quand on constatera sur notre liste qu'aucune n'a encore été tenue. Pour une bonne, heureuse et satisfaisante année 2012, faut-il se résoudre à ne pas être meilleur qu'en 2011?

C'est un rituel classique, à quelques jours de la fin de l'année: agences de presse et grandes entreprises transmettent aux journalistes les résultats de sondages sur les résolutions du Nouvel An.

Le Groupe Investors, par exemple, a révélé, le 22 décembre dernier, que 72% des Canadiens ne s'embarrassent pas de résolutions du Nouvel An. «Ceux qui en prennent reconnaissent qu'ils ont du mal à les tenir. Seulement 13% des répondants au sondage disent tenir leurs résolutions et 14% disent ne jamais être capables de les tenir», énonçait aussi le communiqué, avant de glisser en douce le conseil d'un planificateur financier du Groupe Investors. «Même si la plupart des Canadiens ne prennent pas de résolutions concrètes chaque année, le passage à la nouvelle année est le moment idéal pour réfléchir sur ce que l'on voudrait changer sur le plan financier, personnel ou professionnel», déclarait un certain Bruno Therrien.

Les céréales Special K, pour ne pas les nommer, ont aussi sondé la population canadienne sur le vaste sujet des résolutions, mais avec des conclusions totalement contradictoires à celles de Group Investors. «La nouvelle année étant presque à nos portes, près de 70% des gens au pays planifient leurs résolutions pour l'année 2012», affirmait le communiqué du sondage. Les résolutions en tête de liste de cet échantillon de gens motivés: le développement personnel continu (20%), l'activité physique (16%) et une alimentation équilibrée (13%).

Saines, les résolutions?

Les résolutions, qu'on soit pour ou contre, occuperont les discussions de bureau et les espaces publicitaires dans les prochains jours. Mais sur le plan psychologique, est-ce un réflexe collectif sain et constructif?

«En général, ça ne fonctionne pas, pour la simple raison que trop souvent, les gens prennent la résolution de se battre contre eux-mêmes et de devenir quelqu'un d'autre», tranche Rose-Marie Charest, présidente de l'Ordre des psychologues du Québec, qui, sans vouloir jeter le bébé avec l'eau du bain, estime qu'il serait plus humain et encourageant de s'accepter plutôt que de chercher à ressembler à une norme.

«Il est légitime de vouloir se remettre en forme. Mais si on déteste le gym, le fait de changer de gym ne changera rien. Il est préférable de partir de ce qu'on aime faire comme exercice. De cette façon, on a plus de chances de s'améliorer plutôt que de se forcer à adopter un comportement trop loin de ce qui nous ressemble.»

En cette ère de détox, de défis sans sucre, de blogues qui déclinent en 1 million de variations le thème «de 365 jours de yoga chaud, sans maquillage, sans sexe», l'attrait de se transformer en un être meilleur et plus vertueux est grand. C'est pourquoi la suggestion de Rose-Marie Charest de s'accepter nous paraît presque... délinquante!

Réflexion

Aussi suggère-t-elle à ceux qui sont encore en vacances de profiter de ce temps de réflexion pour se poser sérieusement des questions sur leur vie. «Sur quoi ai-je le contrôle? Qu'est-ce que je voudrais améliorer dans ma vie personnelle? Où en sont mes choix de relations? Ma carrière? Mon travail? Voilà une approche plus positive que d'entreprendre un combat contre soi-même.»

Et à ceux qui depuis trois ans prennent la résolution de rencontrer l'amour de leur vie et se cassent inlassablement la figure dans des relations cul-de-sac, elle suggère de se pencher sérieusement sur leurs blocages en entreprenant une thérapie. «Tout le monde n'a pas besoin de thérapie. Mais quand on répète des choix négatifs, il est bien de trouver de l'aide.»

Améliorer qui on est plutôt que de se battre contre nos faiblesses, telle est l'approche que préconise Rose-Marie Charest en s'inspirant de la psychologie positive, qui s'intéresse au développement des forces plutôt qu'au seul traitement des faiblesses.

Et plutôt que de prendre de grandes résolutions qui, dans le cas où elles ne se réaliseront pas, risquent de miner l'estime personnelle, la présidente de l'Ordre des psychologues suggère de se résoudre à «prendre du temps pour ressentir ce qui se passe dans notre vie, plutôt que d'être constamment en mode de réaction à l'extérieur».

Une année sans défi, ça vous dit?