Dans bien des cultures, les cheveux sont porteurs de sens. Pas pour rien que des femmes, le plus souvent, accordent à leur coiffure une attention de tous les instants. C'est particulièrement vrai dans certains pays africains, où la longueur et l'agencement des cheveux transmettent souvent des messages très précis. Une exposition lève le voile sur cet univers fascinant.

«Ici, les Québécois disent de nos tresses: «Ah! c'est ben beau, c'est spécial, c'est original...» Mais ce sont des tresses qui parlent. Il y a des messages, dans ces coiffures», explique Lydie Olga, directrice du Musée de la femme, qui a conçu l'exposition Parures de tête... le cheveu dans tous ses ébats, qui occupera le cinéma ONF pendant le Festival international du film black.

Derrière chaque tresse, rallonge, chignon, perruque ou dreadlocks, il y a une symbolique, un message lancé à la divinité et aux mortels, assure Lydie Olga, qui a eu l'idée de monter cette expo lors d'un séjour dans son Sénégal natal.

Lydie - qui, soit dit en passant, paie une petite fortune pour la «couture» de ses rallonges confectionnées de cheveux importés d'Inde - en connaît un rayon sur la science capillaire africaine. En Afrique, dit-elle, la tête représente le contact divin. Aussi, le lien de loyauté établi avec la coiffeuse familiale n'est pas à prendre à la légère.

«Jamais tu ne verras un Africain caresser la tête de quelqu'un. On ne touche pas les cheveux n'importe comment. Les gens ont peur parce qu'avec les cheveux, on peut faire du maraboutage, aller voir les sorciers. La coiffeuse tresse toute la famille, de génération en génération. Pour cela, on ne peut pas changer de tresseuse: elle détient les secrets et il faut lui faire confiance.»

Des photos et objets en provenance du Sénégal, du Gabon, du Soudan, donnent un aperçu de l'exposition qui débutera en même temps que l'ouverture du Festival du film black. Une photo d'une voluptueuse femme Léboue sénégalaise au couvre-chef touffu (prise dans les années 60) symbolise la coiffure typique de l'Africaine mariée. «Plus les cheveux sont gonflés, plus il y a de parures et de bijoux, plus la richesse est mise en valeur», indique Lydie Olga.

À côté de cette princesse couverte de dorures, le cliché d'une divorcée au crâne orné de quelques tresses aplaties contraste. «Au Soudan, lorsqu'une femme perd son mari, elle a deux choix: soit elle se rase complètement le crâne, soit elle porte des tresses «couchées» sur la tête. C'est une façon de déshumaniser la femme, de lui faire porter le deuil.»

Mais le plus spectaculaire des tableaux de l'exposition Parures de tête est sans doute la photo d'une Nigériane, dont la tête est recouverte d'un «éventail» de cheveux, qui a l'apparence d'une aile de papillon. «On a choisi cette photo pour démontrer le calcul géométrique qui va dans la conception de ces coiffures. Une tête comme ça dit: «Je suis une femme à marier.»»

Un chignon logé sur le sommet du crâne? Celle qui le porte transmet son désir d'être en lien avec le divin. Une longue natte qui descend jusqu'à la taille, en revanche, symbolise une recherche de la fertilité. Dans certaines cultures africaines, des petits coquillages et autres grigris sont épinglés à la coiffure en guise de porte-bonheur.

Et à l'époque de l'esclavage, le tressage avait carrément une fonction stratégique, nous apprend Lydie Olga. «Les femmes regardaient les sentiers dans les champs, prenaient note de la présence de gardes de sécurité, et organisaient les tresses sur la tête des enfants de manière à permettre aux hommes de déterminer le chemin par lesquels ils pourraient s'échapper. C'était du Google Map avant l'heure!» évoque Lydie Olga, avant de laisser échapper un grand éclat de rire.

Aujourd'hui, même si les Noires nord-américaines s'inspirent davantage de Beyoncé ou Naomi Campbell pour leur style capillaire, elles choisissent avec soin leur «tresseuse». «On ne va pas n'importe où. D'habitude, ça passe par une amie, qui nous recommande une personne et nous assure qu'elle est correcte.»

À chaque coiffure son histoire. Aux dieux de décoder les messages de ces «Parures de tête».

Parures de tête... le cheveu dans tous ses ébats, présenté à l'ONF du 22 septembre au 2 octobre.