Elle a été l'une des premières à raconter, avec beaucoup de sincérité, l'envers de la maternité. Près de 20 ans après The Mother Zone, la journaliste torontoise Marni Jackson récidive et publie cette fois la suite, prévisible mais néanmoins difficile, de son récit: le départ de son enfant, devenu grand.

S'il faut en croire son témoignage, The Myth of the Empty Nest, en librairie demain, ça n'a rien d'évident. «Je n'étais pas préparée.» Est-ce vraiment le cas de tous les parents?

Née à la fin des années 40, Marni Jackson fait partie de la première vague de baby-boomers. Si le sujet est d'actualité aujourd'hui, c'est une question de «démographie», dit-elle. «Nous sommes un très grand groupe de parents à voir nos enfants partir en même temps.»

Dans son livre, elle compare sa jeunesse, dans les années 70, et celle de son fils, aujourd'hui. Un monde. «Moi, je ne me suis jamais préoccupée de ma carrière», dit-elle. Elle pensait plutôt à s'amuser, voyager et, surtout, quitter le nid familial.

À l'inverse, elle a toujours été très, mais très proche de son garçon. Très présente, amie, confidente. Du style, encore aujourd'hui, à lui prêter des livres, échanger des textos ou aller à la clinique lui chercher une prescription... «J'ai été totalement velcro, reconnaît-elle. Et maintenant, je dois apprendre à me détacher. Unmother. Tout un apprentissage.»

Un peu, beaucoup ou pas du tout velcro

Robert Beauchemin, 53 ans, a lui aussi du mal à voir sa fille, Alexandra, 18 ans, quitter le nid familial. Elle vient pourtant de partir en appartement. «J'étais du genre: as-tu un grille-pain? Je vais t'acheter un micro-ondes. Mais quand est-ce que tu vas trouver le temps d'étudier si tu continues de travailler?»

Il faut dire qu'il a été un père très engagé. Après une jeunesse passée dans une commune, il a finalement eu trois enfants. Alexandra, la cadette, c'est lui qui l'a littéralement mise au monde. «Dès le début, j'ai été hyper engagé.» D'où la délicate transition de «père» à «ami». «D'un côté, c'est tellement beau de voir tous ses espoirs, le monde qu'elle a devant elle. Mais de l'autre, je n'ai pas le goût de m'éloigner trop. Je veux être là si elle a un problème.» Du coup, il fait religieusement les courses et la popote avec elle les dimanches et il ne refuse jamais d'aller la conduire chez IKEA. L'autre jour, il l'a même accueillie à bras ouverts pour une nuit «à la maison», parce qu'elle était fiévreuse. «Peut-être que c'est une façon pour nous de rester jeunes, de les voir aller autour de nous comme ça.»

Tous les parents ne voient toutefois pas le départ de leurs grands enfants comme ça. Pascale Pontoreau, de son côté, a été très heureuse de voir ses deux «jeunes adultes» de 18 et 20 ans quitter la maison. «On ne s'endurait plus», dit-elle. Et depuis que ses filles ont goûté à une certaine indépendance, leur relation s'est nettement améliorée. «Je suis très fière de voir ce qu'elles deviennent. De les voir grandir.»

Dans la famille Tiffou, enfin, on sait que le départ de l'aînée, Laetitia, 21 ans, «complètement adulte», n'est pas loin. «C'est dans l'ordre des choses», confie son père, Benoît. Des deuils, il en a déjà fait. À l'adolescence, notamment. «Le temps passe si vite. Un jour, elles ont 20 ans! Alors on en profite et on savoure...»