Alors que nous plongeons avec délectation dans nos lectures d'été, que font les auteurs pendant la saison chaude? Chrystine Brouillet, dont vient de paraître le roman Sous surveillance, qui relate les plus récentes aventures de la policière Maud Graham, nous répond. Et fait quelques suggestions de lecture.

«Je lis tout le temps, toute l'année», laisse tomber Chrystine Brouillet, qui avoue tout de même faire un peu de rattrapage pendant l'été. «Le reste de l'année, je lis beaucoup de polars (dont elle parle à l'émission Vous m'en lirez tant, à la Première chaîne de Radio-Canada). Peut-être que j'en lis un peu moins pendant l'été et que je me reprends sur d'autres types de livre.»

 

L'auteure ne change pas grand-chose à sa routine, donc, quelle que soit la saison. Lève-tôt - elle est debout dès 4h30 -, elle va au gym au moins quatre fois par semaine, puis écrit toute la matinée. L'après-midi, dans son très intime jardin du Plateau-Mont-Royal, elle se consacre à la recherche. «Le bonheur, en buvant du thé, en grignotant une pâtisserie.»

Les vacances? Connaît pas. Quand Chrystine Brouillet voyage, c'est pour le travail. «Je ne sais pas c'est quoi, louer un chalet pendant un mois, ou partir deux semaines à la mer. Je trouve ça fantastique, les gens qui font ça, mais pour moi, c'est surréaliste. Ce n'est pas dans mon code génétique.» Elle admet que le fait de pratiquer un métier intéressant, qui lui permet de rencontrer «des gens chouettes», rend les vacances moins nécessaires. «N'empêche qu'écrire reste difficile. Pas douloureux, c'est mentir de dire ça, mais exigeant.»

Chrystine Brouillet sera encore présente à la radio au cours de l'été, avec L'appétit vient en lisant, qu'elle coanime avec Liza Frulla et qui sera diffusée le dimanche à 15h, à la Première chaîne. Période estivale oblige, les huit émissions sont déjà toutes enregistrées. Elle peut donc se consacrer pleinement à l'écriture du prochain Maud Graham, ainsi qu'à ses Carnets parisiens.

«J'aime écrire l'été. S'il y a une différence avec le reste de l'année, c'est que j'ai plus la paix. Le téléphone sonne moins, il y a moins de courriels. Et j'aime avoir la paix.» On l'imagine entourée, recevant deux fois par semaine... «Mais c'est du travail, recevoir. Je n'ai pas le temps de consacrer 20 heures par semaine à un souper. D'ailleurs, l'autre avantage de l'été, c'est que mon chum cuisine beaucoup sur le gril.»

Maud Graham

La 11e enquête de Maud Graham comptera assurément parmi les lectures d'été de bien des gens. Chrystine Brouillet en est consciente: la policière de Québec est devenue une vieille amie que les lecteurs, et l'auteure, retrouvent avec plaisir. «Les gens me demandent souvent de ses nouvelles, comment vont ses histoires d'amour, ses amis, ses collègues. Elle existe vraiment dans l'esprit du public, je suis très privilégiée de vivre ça.»

Cette fois, la romancière a construit une intrigue en toile d'araignée mettant en scène Gabrielle, entraîneuse dans un gym, qui revient vivre à Québec après 10 ans. Elle y lie des amitiés et renoue avec un ancien copain sans savoir qu'elle se met en danger: l'homme, Alexandre, est maladivement possessif. Il rêve de ne l'avoir que pour lui, quitte à la tuer s'il n'y parvient pas - il l'a déjà fait avec de précédentes compagnes.

C'est un sujet que Chrystine Brouillet désirait aborder: l'obsession amoureuse, mais aussi cette espèce d'inquiétude liée à notre époque, où nos moindres faits et gestes sont connus. «Moi, 1984 d'Orwell, ça m'avait terrifiée. Aujourd'hui, les gens sont inconscients, il disent tout sur eux. Ils ne connaissent pas les dangers d'exposer leur vie privée ainsi. Si je ne suis pas sur Facebook, c'est pour ça, parce que ça me met mal à l'aise.»

Chrystine Brouillet ne sait pas encore quelle forme prendra la prochaine enquête de Maud Grahamet c'est le casse-tête qu'elle mettra en place au cours de l'été. Tout en buvant du thé, en préparant la marinade du prochain barbecue, et peut-être en relisant Michel Tremblay. «J'aime lire Tremblay l'été, j'ai beaucoup aimé ses trois traversées (La traversé du continent, La traversée de la ville, La traversée des sentiments). J'adore Nana, elle peut faire ou dire ce qu'elle veut, j'irais n'importe où avec elle.»

Sous surveillance, Chrystine Brouillet. La courte échelle, 392 p., 29,95$.

LES SUGGESTIONS DE CHRYSTINE BROUILLET

Mai au bal des prédateurs, de Marie-Claire Blais

«Marie-Claire Blais devrait être classée trésor national, comme ils font au Japon. On est un meilleur humain après avoir lu ce livre, il y a de la tendresse, de la compassion, de la lumière dans la noirceur. Et il y a cette idée que l'art peut sauver le monde. C'est un livre aux images puissantes, à la construction habile. Il ne faut pas avoir peur d'y plonger, comme on n'hésite pas à voyager dans des pays qu'on ne connaît pas.»

Le mort du chemin des Arsène, de Jean Lemieux

«C'est un policier classique, mais qui se passe aux Îles-de-la-Madeleine. Tu lis ça, et après 10 pages, tu as envie d'y aller! C'est d'ailleurs ce qu'un de mes amis a fait... Il y a un vocabulaire de la mer aussi, qui n'est pas plaqué, naturel. On aime bien l'enquêteur qui rêve de quitter les Îles mais qui ne part jamais. C'est sans coquetterie et efficace.»

Tamara Drewe, de Posy Simmonds

«C'est une BD qui se lit d'un seul coup, c'est très réussi. On suit une retraite d'écrivains, leur prétention. C'est ironique et sarcastique, mais pas seulement ça, puisqu'on parle aussi des effets de l'ennui sur des ados, dans un village où il ne se passe rien.»

Mon cours de cuisine. Les basiques confitures

«Je ne pouvais pas m'empêcher de mettre un livre de cuisine dans ma liste. Toute cette série est formidable, il n'y a rien à ajouter sur chaque thème (le chocolat, la cuisine asiatique, etc.). J'ai fait la moitié des recettes de celui sur le chocolat, c'est simplement parfait.»