En 50 ans, on en a entendu des vertes et des pas mûres. Il fallait arrêter après sept ans. Elle risquait de donner le cancer. Elle ferait grossir. Perdre la libido. Et quoi encore? Nous avons demandé à Andrea Tone, spécialiste de l'histoire de la médecine à McGill et auteure de History of Contraceptives in America, ainsi qu'à Corinne Leclercq, présidente de l'Association des gynécologues et obstétriciens du Québec, de répondre à nos questions. Le point, donc, sur cette toute première pilule que les femmes prennent non pas pour guérir une maladie, mais bien pour améliorer leur qualité de vie.

Q: Il y a 50 ans précisément, la pilule contraceptive arrivait sur le marché.

FAUX

R: Les médias américains indiquent tous le 9 mai comme date d'anniversaire de la pilule. Mais en fait, le 9 mai, la Food and Drug Administration n'a fait que préapprouver la première pilule contraceptive. La pilule est en réalité arrivée sur le marché aux États-Unis le 23 juin 1960, pas avant.

 

Q: Les micropilules aujourd'hui n'ont plus rien à voir avec la toute première pilule contraceptive, qui a, on le sait, révolutionné la vie des femmes.

VRAI

R: Vrai, parce que les pilules (il existe différentes marques aujourd'hui) sont chimiquement et pharmacologiquement différentes de la première pilule approuvée en 1960. La concentration d'hormones représente le dixième de ce qu'elle était à l'époque. De plus, les nouvelles pilules ont des avantages que n'avait certainement pas l'originale: elles réduisent les problèmes d'acné, les syndromes prémenstruels et les risques de certains cancers.

Q: Les femmes qui fument ne devraient pas prendre la pilule.

FAUX

R Les femmes qui fument ne devraient pas prendre la pilule après 35 ans. Nuance. Avant, les risques ne sont pas significatifs. Or, après, statistiquement, les risques cumulés (associés à l'oestrogène dans la pilule d'une part, et à la cigarette d'autre part) sont multipliés par cinq en ce qui concerne les caillots, AVC et d'autres maladies cardiaques. Une femme qui ne fume pas, en revanche, peut prendre la pilule jusqu'à la ménopause.

Q: La pilule a deux inconvénients majeurs: elle fait grossir et diminue la libido.

FAUX

R: Ce n'est pas vrai pour toutes les femmes. Dans les années 60, beaucoup de femmes ont affirmé avoir augmenté de taille de soutien-gorge grâce à la pilule, et avoué qu'elles ne changeraient cela pour rien au monde! De nos jours, plusieurs femmes commencent à prendre la pilule à l'adolescence, âge où le corps, pilule ou pas, a tendance à changer. Quant à la libido, tout est une question de perception. Vrai, certaines femmes notent que le fait d'avoir un taux d'hormones constant dans le corps pendant le mois réduit leur appétit sexuel. En même temps, dans les années 60, les femmes affirmaient que le fait de ne pas avoir à craindre une grossesse pendant leurs relations stimulait beaucoup leur libido. Tout est donc relatif!

Q: Avec la pilule, les menstruations sont artificielles et inutiles. Mieux vaut prendre la pilule en continu et ne plus jamais être menstruée.

FAUX et VRAI

R: Ici, les deux expertes ne s'entendent pas tout à fait. Faux, dit la première: ce qui est artificiel, c'est de mettre le corps dans un état de pseudo grossesse, en l'empêchant de produire les hormones nécessaires à une vraie grossesse. Et c'est ça que fait la pilule. Quand vous arrêtez une semaine, votre corps revient à son état naturel, et vous avez vos menstruations. Et pour certaines femmes, cette semaine de menstruations reste un moment important qui leur confirme leur fertilité. Vrai, rétorque la seconde, qui rappelle que le cycle de 28 jours n'a été pensé que pour satisfaire les exigences catholiques de l'heure, l'Église ne voyant pas d'un très bon oeil que l'on supprime ainsi les menstruations des femmes. Le cycle étant entièrement artificiel, dit-elle, rien n'empêche de n'être menstruée qu'aux deux mois, aux six mois, ou pourquoi pas jamais.

Q: La prochaine pilule sera la pilule pour les hommes.

VRAI (mais faux!)

R: Ce sera compliqué. Mais pourquoi pas? D'ici 10 ans, les chercheurs devraient y arriver. Par contre, les femmes feront-elles confiance à cette nouvelle pilule? Pas sûr...