Aleris, Rio Tinto, Merck Frosst, la mine d'amiante Jeffrey d'Asbestos, CGI, Bell: les licenciements se multiplient et ont fait grimper le taux de chômage à 7,3% au Québec. Mais y a-t-il une vie après la perte de son emploi? Exemples d'espoir avec des gens qui ont vécu le grand vertige du licenciement et pour qui ce malheur a surtout été un grand révélateur.

En avril 2007, Norsk Hydro a fermé ses portes. Du coup, 380 personnes des environs de Bécancour perdaient leur emploi, parmi lesquels Alain Dufresne. Près de deux ans plus tard, il travaille avec 15 autres «ex» de Norsk Hydro, mais à l'autre bout du monde, en Nouvelle-Calédonie.

Alain Dufresne travaillait comme ouvrier à l'usine de Bécancour depuis 18 ans. «Quand l'usine a fermé, les gens se sont dispersés au Québec, au Canada et ailleurs dans le monde. Ça n'a pas été long que des connaissances m'ont dit: «pourquoi tu ne viendrais pas chez nous?»«

Chez nous, ce n'est pas nécessairement au coin de la rue. Pour Alain Dufresne, ça a d'abord été dans le sultanat d'Oman, au Moyen-Orient, par l'intermédiaire d'une firme de consultants... de Shawinigan.

Le souvenir qu'il garde d'Oman est en fait le souvenir d'une couleur: beige, beige et re-beige. «Tu peux rouler pendant 400 kilomètres, et c'est toujours le même paysage beige! Comme les gens sont très riches, à Oman, ils sont nombreux à rouler en Ferrari à des vitesses folles. Les routes sont très dangereuses là-bas. C'est comme si on roulait en plein Grand Prix, tout le temps.»

«Une gare en attirant une autre», comme il dit, Alain Dufresne est ensuite débarqué en Nouvelle-Calédonie, les pieds dans le Pacifique, cette fois accompagné de sa conjointe - «une infirmière qui peut maintenant se reposer un peu et qui le mérite!» - et de leurs deux enfants.

Là-bas, Alain Dufresne travaille au démarrage de l'entreprise Goro Nickel. Les employés viennent de partout: de France, de la Nouvelle-Zélande, des Philippines, de Tahiti, du Québec et bien sûr, de la Nouvelle-Calédonie.

«La chasse et la pêche sont encore très présentes ici et plusieurs de mes collègues habitaient encore tout récemment dans leurs tribus. Ce n'est vraiment pas facile pour eux de se plier à un travail à horaires réguliers, de devoir manger à des heures fixes, pas plus que ce n'est facile pour nous, en général, de nous adapter à leur rythme beaucoup plus lent que le nôtre. Tout est lent, ici, y compris l'internet!»

La maison a vue sur la mer. Les jours de congé sont faits de randonnées en montagne ou en catamaran vers les îlots environnants, de plongées en apnée et de sauts aux îles Fidji.

On est loin, très loin de Bécancour... Trop loin? «Ma conjointe et mes fils se sont très bien adaptés. Ça se compliquera quand les enfants seront plus vieux et quand ils seront rendus aux études supérieures. Pour ma part, c'est tout l'un ou tout l'autre: parfois, j'ai envie de rester ici 10 ans, d'autres fois, j'aimerais rentrer. Des projets intéressants s'en viennent au Québec et je serais bien fou de me fermer des portes. J'ai 46 ans, dont 25 ans d'expérience en pétrochimie, en chimie et en métallurgie. Je suis encore un jeune homme avec beaucoup d'années devant moi!»

Si l'envie les prenait de rester en Nouvelle-Calédonie un peu plus longtemps, il n'est pas impossible que la récente entente entre le Québec et la France permette à la conjointe d'Alain Dufresne de pratiquer en Nouvelle-Calédonie, puisque c'est un département français.

En attendant, il fait plus de 35 degrés à Nouméa, la capitale...