Avouez: en regardant le bel Alexandre Despatie, ou encore la jolie brochette de nageuses synchronisées, vous allez sans doute vous mettre à rêver. Et si un jour vos destins se croisaient? Attention, danger. Vivre avec un athlète, ça n'a rien d'un conte de fées. Désolée.

Une faim de loup. Des pâtes, de la viande, des légumes. Même trio tous les soirs. Jamais d'alcool. Ni de sorties trop tardives. Des valises qui traînent dans la maison. Un sommeil sacré. Même avec un bébé.

Mais tout cela, ce n'est rien. Le pire, ce sont les hauts, et surtout les bas. «Il y a beaucoup plus de bas que de hauts. C'est pas facile. Tu veux pas voir ton conjoint malheureux.»

Élise Hofer en sait quelque chose. Son conjoint, père de son fils de 1 an (pour lequel il ne s'est «jamais, jamais, jamais» levé la nuit), est Dominique Perras, cycliste québécois sacré champion canadien sur route en 2003. Il ne s'est pas qualifié pour Athènes. «Le plus dur, c'est avant une grosse compétition. Si ça ne se passe pas bien, il a un gros down. Une grosse déprime d'une journée, puis il se concentre sur sa prochaine course. Ça pèse.»

La jeune femme, qui travaille en publicité, est l'une des rares femmes d'athlètes qui ne soit pas elle-même issue du monde du sport.

Pour cause: pas facile de survivre à un athlète, quand on ne connaît pas déjà les exigences de ce mode de vie. «Non, c'est pas facile, parce que le sport est la priorité. C'est pas tout le monde qui va accepter que le sport passe avant.» Daniel Saint-Hilaire est entraîneur d'athlétisme depuis près de 40 ans. Il a connu près de 2000 athlètes, dont Bruny Surin et Nicolas Macrozonaris. S'il n'y a évidemment pas de statistiques officielles sur la question, la grosse majorité des athlètes professionnels qu'il a côtoyés sont célibataires, avance-t-il. Et de tous ceux qui vivent en couple, seuls 10% tiennent le coup. «Quatre-vingt pour cent se séparent.»

Pour se préparer pour les Jeux, certains mettent même un terme à leur relation. «C'est pas un travail de 9 à 5, il faut être concentré 24 heures sur 24. Souvent, cela crée des tensions, explique l'entraîneur, lui-même resté longtemps célibataire. Si t'es bon, t'es hors de chez toi 40 semaines par année. C'est dur pour la vie de couple.»

Souvent, le conjoint (généralement LA conjointe) ne comprend tout simplement pas le rythme de vie de l'athlète. L'entraîneur doit parfois se transformer en thérapeute conjugal. Il se souvient d'un athlète qui lui a un jour demandé de parler à sa copine. «Elle comprend pas, peux-tu lui expliquer?»

En cas de séparation, les athlètes vivent généralement une «grosse» déprime qui dure maximum... sept jours. Pas une minute de plus. «Comme pour Céline Dion. Si un jour ça va mal avec René, quand elle va chanter, il ne faut pas que cela paraisse. The show must go on

Guy Thibault, ex-entraîneur chef de l'équipe nationale de patinage de vitesse courte piste, abonde dans le même sens. «Pour un athlète olympique, chaque minute compte. Chaque minute que tu donnes à quelqu'un, c'est une minute que tu enlèves à ta préparation olympique, à ta médaille.»

Tous les sacrifices que l'athlète est prêt à vivre (le régime strict, les horaires régimentaires), «le conjoint va les subir».

Alors quoi, mission impossible, vivre une idylle avec un athlète? «Cela prend quelqu'un de très patient et de très ouvert d'esprit. C'est pas évident, répond Guy Thibault. Parce que c'est sûr que l'athlète fait des sacrifices, mais le conjoint en fait encore plus.»