Boire beaucoup de boissons sucrées et manger beaucoup d'aliments préparés sucrés double le risque de mourir d'un trouble cardiaque, selon une nouvelle étude américaine. Les impacts sont aussi importants que ceux de l'hypertension non maîtrisée. Le coupable : le fructose, utilisé par l'industrie alimentaire, qui endommage autant le foie que l'alcool.

L'étude, publiée par le Journal de l'Association médicale américaine - médecine interne, a suivi 11 700 personnes pendant 15 ans. À trois reprises, leur consommation de « sucre ajouté » a été mesurée. La catégorie englobe les boissons gazeuses, les produits préparés (biscuits, plats, yogourts) et, bien entendu, le sucre qu'on met dans son café.

« Les études précédentes avaient montré qu'il y a un effet quand on prend beaucoup de boissons sucrées », explique l'auteur principal de l'étude, Quanhe Yang, des Centres de contrôle des maladies (CDC) du gouvernement américain. « Mais ce n'était pas si important, 39 % d'augmentation de risque pour les gens qui en prennent beaucoup, soit plus de sept cannettes par semaine. Nous avons englobé aussi les nourritures solides, et cette fois, le résultat est beaucoup plus probant. »

À l'Institut de cardiologie de Montréal, Martin Juneau est bien conscient du problème. « Depuis une dizaine d'années, j'ai complètement changé mon message sur la prévention, dit le Dr Juneau. On a mis l'accent pendant des décennies sur le gras, alors qu'il faut s'attaquer au sucre. Le problème, avec le sucre ajouté dans les boissons gazeuses et les mets préparés, c'est qu'il s'agit de fructose, un sucre qui est directement métabolisé par le foie, comme l'alcool. Le sucre qu'on met dans son café et dans les gâteaux préparés à la maison est moins dangereux. Souvent, les gens vont dire que le fructose ne doit pas être si dangereux puisqu'il est présent dans les fruits. Oui, c'est vrai, mais dans les fruits, il est combiné aux fibres. Les fibres augmentent la sensation de satiété, contrairement aux boissons sucrées. »

L'étude américaine note que les autorités médicales émettent différentes recommandations sur le niveau de sucre ajouté que ne doit pas dépasser une diète. L'OMS recommande moins de 10 %, une cible atteinte par moins du quart des Américains. L'Institut de médecine du gouvernement américain propose 25 %, un niveau dangereux, selon M. Yang.

Un commentaire accompagnant l'étude appelle à la taxation des boissons sucrées. Pourquoi se limiter aux boissons ? « C'est ce qu'il y a de plus facile », explique l'auteure principale du commentaire, Laura Schmidt de l'Université de Californie à San Francisco. « Et selon les données qu'on a dans les 15 pays qui taxent les boissons gazeuses, la consommation semble diminuer. » En 2012, un essai remarqué dans la revue Nature avait appelé à une réglementation du sucre ajouté semblable à celle qui encadre l'alcool, substance jugée par son auteur aussi toxique que le fructose.

Le sucre mortel

Augmentation du risque de mourir d'un trouble cardiovasculaire, au cours d'un suivi de 15 ans, pour quatre niveaux de consommation de sucre ajouté, par rapport à une très faible consommation. L'échantillon a été divisé en cinq groupes comportant le même nombre de personnes (quintiles), en fonction de la consommation de sucre ajouté.

Consommation très forte (plus de 21 % des calories quotidiennes) : 103 %

Consommation forte (17 à 21 % des calories quotidiennes) : 38 %

Consommation moyenne (13 à 17 % des calories quotidiennes) : 18 %

Consommation faible (10 à 13 % des calories quotidiennes) : 7 %

SOURCE : Journal of the American Medical Association