Les Québécois savent qu'ils doivent manger mieux et sont prêts à faire des efforts... limités. Les deux tiers (65%) d'entre eux achèteraient des céréales contenant moins de sucre afin de «réduire les conséquences négatives sur leur santé», selon un sondage IPSOS réalisé du 18 au 24 octobre derniers, obtenu par La Presse. Mais à peine 53% des personnes interrogées consommeraient un dessert préparé réduit en sucre.

«Changer les habitudes alimentaires est difficile, ça ressort très clairement», note Annick Van Campenhout, directrice générale du Conseil des initiatives pour le progrès en alimentation (CIPA), qui a commandé cette enquête.

Autre preuve: 61% des gens sondés mangeraient des croustilles contenant moins de sodium «afin de réduire les conséquences négatives sur leur santé cardiovasculaire». Seulement 47% des personnes interrogées achèteraient des frites moins salées, et 44% du pain réduit en sel. «Le pain est pourtant la principale source de sodium, parce que les gens en consomment plusieurs portions par jour», indique Nathalie Jobin, codirectrice de Nutrium, portail de services en nutrition de l'Université de Montréal. En réduire le taux de sel «aurait un réel impact», souligne-t-elle.

Près d'un Québécois sur quatre (23%) affirme ne jamais regarder les étiquettes nutritionnelles. Les autres consultent d'abord la quantité de calories (36%), de sucre (15%) ou de gras trans (13%) contenus dans les aliments, mais oublient l'impact du sel sur leur santé.

Une majorité d'infirmiers et de médecins, aussi interrogés par IPSOS, ont affirmé qu'ils manquent de temps pour couvrir en profondeur «le volet préventif de la nutrition».

L'industrie réagit

Devant ces difficultés à agir pour améliorer la santé des consommateurs, l'industrie agroalimentaire a un rôle crucial à jouer, estime Mme Van Campenhout. Il y a un an, son organisme a lancé Melior, programme volontaire qui propose aux entreprises d'améliorer la composition nutritionnelle de leurs produits ou de rendre les aliments sains plus accessibles. Seulement cinq entreprises ont adhéré au programme, même si 77 ont été contactées et 25 ont été rencontrées. Une douzaine d'autres entreprises s'engageront bientôt, annonce Mme Van Campenhout.

Un exemple intéressant: les restaurants Pacini offrent maintenant la possibilité de choisir des pennes aux grains entiers plutôt que des pâtes blanches. La teneur en sel des sauces est aussi en train d'y être réduite de 20%. Les supermarchés IGA travaillent, quant à eux, à améliorer la valeur nutritive de leurs pains Compliments, en plus de distribuer des recettes santé en magasin. Le groupe Compass, présent dans 250 cafétérias du Québec, s'est enfin engagé à hausser de 20% l'offre de fruits, de légumes et de salades.

Cacher son virage santé

Étonnamment, «des entreprises font des gestes, mais ne veulent surtout pas le dire pour que leur clientèle s'en rende compte», indique Daniel Tremblay, consultant pour Melior et ex-gestionnaire chez Provigo et Loblaw.

Un fabricant de pâtisseries, qui ne voulait pas reformuler son glaçage, a ainsi choisi de réduire ses portions, une démarche cautionnée par Melior. «Les gens vont changer leurs habitudes en douceur», souligne Mme Van Campenhout.

En France, les engagements pris par l'industrie agroalimentaire pour améliorer la valeur nutritionnelle des aliments n'ont pas réussi à abaisser suffisamment le taux de sucre, de sel et de gras des produits offerts, selon une récente étude de l'Observatoire de la qualité de l'alimentation.

Melior est financé par Québec en forme, qui fournit un budget de 2,7 millions pour trois ans.

Prêts à manger des croustilles moins salées

Quels produits annoncés comme «réduits en sel» seriez-vous prêts à consommer afin de diminuer les conséquences négatives sur votre santé cardiovasculaire?

61%: croustilles

61%: soupe en conserve

55%: charcuteries

47%: frites

44%: fromage

44%: pain

Source: Sondage IPSOS réalisé du 18 au 24 octobre 2012, auprès de 1202 répondants, pour Melior.