Une bonne odeur de four à bois règne dans Pointe-Saint-Charles, les vendredis soir. Elle ne sort pas d'une boulangerie, ni d'une pizzeria, mais d'un nouveau complexe de condos et maisons de ville écolos, la Maison productive.

«Un bon design intègre le mode de vie, le travail, la production de nourriture, le transport et les loisirs», lit-on dans le manifeste de Rune Kongshaug, l'architecte du projet. En entrevue avec La Presse, il résume sa pensée en riant: «Ici, on met carrément la main à la pâte!» Pas le choix de travailler: des légumes poussent dans des serres, sur le toit du complexe, et un traditionnel four à pain en briques règne au sous-sol.

C'est autour du four qu'est né le club Produktif, en novembre dernier. Mission: «nourrir la communauté de Pointe-Saint-Charles», explique Martine Boyer, responsable des membres. Tous les week-ends, de bons pains et croissants biologiques sont cuits à la Maison productive, sous la supervision du boulanger Dominique Gauvrit, un ancien travailleur de Première Moisson. Pour s'en procurer, les membres du club dépensent des points, préalablement payés. Prix: 3,75$ pour un pain blanc, de seigle ou au levain. Moins si l'on achète des points en grande quantité.

«On a fait une étude de marché et on vend de 20 à 25% moins cher que dans les boulangeries du marché Atwater», fait valoir Mme Boyer. «On ne fait vraiment pas ça pour l'argent, renchérit Kareen Smith, designer intérieure du complexe, qui n'hésite pas à faire goûter ses produits aux nouveaux venus. On fait ça pour revitaliser le quartier. C'est pour ça que ce n'est pas une boulangerie, mais un club où les gens peuvent s'engager et s'amuser ensemble.»

Soirées pizza

Les vendredis soir sont particulièrement distrayants. Les membres du club sont invités à garnir une pizza à leur goût, à la faire cuire, à l'emporter... ou à la déguster sur place. «On a fait venir le chef Francesco, de la pizzeria Mezzaluna de New York, pour qu'il nous apprenne à les faire», raconte Mme Smith. Elle-même a appris à pétrir la pâte avec agilité, La Presse peut en témoigner. «Certains apportent leur bière ou leur vin et restent jusqu'à tard le soir», ajoute Mme Boyer.

«Ce que je pense du club Produktif? J'en mange! commente Jacinthe Carbonneau, une membre qui travaille dans Pointe-Saint-Charles. Faire la pizza, c'est amusant, et je suis accro à leurs pains et croissants.» Même enthousiasme chez Micheline Laniel, qui habite près du canal de Lachine. «J'aime le principe du club, dit-elle. C'est extrêmement sympathique.»

Ouvrir d'autres maisons productives

L'architecte Rune Kongshaug, qui rêve d'autosuffisance alimentaire en ville, compte reproduire le modèle de la Maison productive. «Je ne pourrais pas me permettre un projet comme celui-ci si je ne voyais pas grand», indique-t-il.

En attendant l'ouverture d'un club de pain près de chez vous, il est possible d'acheter les miches du club Produktif au marché public du Club populaire des consommateurs de Pointe-Saint-Charles. Prochaine édition: le samedi 4 juin, au 1950, rue Grand Trunk.