«On manque cruellement de fermes biologiques», a dit hier Isabelle Joncas, agronome chargée de projet pour le réseau de l'agriculture soutenue par la communauté d'Équiterre. Cette année, grâce à ce réseau, une centaine de fermes livreront 10 000 paniers de légumes biologiques par semaine à des citoyens un peu partout au Québec. Mais après 15 ans de croissance, le nombre de paniers ne pourra être haussé, faute de «fermiers de famille», a appris La Presse.

Le nombre de fermes biologiques a augmenté de 33% au Québec de 2006 à 2010, selon Mme Joncas. Mais la croissance est désormais au ralenti dans une majorité de créneaux: 40% du sirop d'érable biologique est encore en stock, a rapporté en février le journal La Terre de chez nous. Le marché du lait bio tarde à reprendre et le prix du grain ordinaire rattrape celui du bio. Heureusement, un nouveau logo, Bio Québec, fera bientôt son apparition sur les produits biologiques de la province pour stimuler les ventes.

Ce qui explique le succès des paniers d'Équiterre dans ce contexte? Alors que le prix élevé des aliments biologiques est souvent un frein à leur consommation, les fermiers de famille pratiquent des prix raisonnables. «C'est de 8 à 30% moins cher que dans les épiceries spécialisées, a indiqué Mme Joncas. Et l'agriculteur reçoit 100% du dollar dépensé.»

Les consommateurs paient à l'avance, au printemps, des légumes d'une valeur de 15$ à 25$ par semaine. Les fermiers les livrent dans 370 points de chute pendant toute la saison des récoltes, de juin à octobre. Trente-cinq entreprises, dont le siège social de RONA, la Standard Life et Ubisoft, permettent à leurs employés de recevoir leurs légumes au boulot. Avis aux intéressés: les inscriptions sont en cours.

Recevoir un panier bio, c'est manger local et solidaire, et cela aide les fermiers à payer semences et machinerie. Alain Désilets, des Vergers aux 4 Vents d'Henryville, l'apprécie. «C'est avantageux: on n'est pas obligés d'utiliser la marge de crédit, au printemps, quand on a beaucoup de dépenses à faire», a-t-il fait valoir. M. Désilets distribue de 150 à 200 paniers par semaine.

«C'est un choix santé, dit Mme Joncas - il n'y a pas de risque de s'exposer aux résidus de pesticides. C'est aussi celui de la fraîcheur. Le goût d'une tomate récoltée le jour même, à maturité, est à son paroxysme.»

Livrer des légumes dans les quartiers mal desservis

La formule des fermiers de famille fête aussi son 15e anniversaire à New York, où 10 000 membres reçoivent leurs légumes chaque semaine, comme au Québec. Les fermes y sont toutefois beaucoup plus grandes - elles produisent jusqu'à 1000 paniers par semaine chacune, a observé Isabelle St-Germain, coordonnatrice générale adjointe d'Équiterre.

Idée intéressante: des fondations aident les familles à faible revenu de New York à participer. Des légumes frais sont ainsi livrés dans des quartiers autrement mal desservis par les marchands d'alimentation, comme on en trouve aussi à Montréal.