À haute dose, certains provoquent des problèmes intestinaux, d'autres sont soupçonnés de causer des maladies ou des accouchements prématurés, voire un afflux de graisses sanguines: des médecins et chercheurs doutent de l'utilité des édulcorants et prônent la modération.

Visant au départ les seuls diabétiques, les édulcorants font depuis plusieurs décennies les beaux jours des régimes amaigrissants.

Parmi les édulcorants «nutritifs», il y a les «sucres» naturels comme le fructose, et les polyols (sorbitol, xylitol...), un peu moins sucrants que le sucre, utilisés dans les bonbons ou le chewing-gum et ne provoquant pas de carie.

Dépourvus de «dose journalière admissible» (DJA), qui définit un seuil de toxicité, ils peuvent pourtant poser quelques problèmes. Le sirop d'agave, mélange de fructose et de glucose, est déconseillé aux diabétiques. Chez des personnes susceptibles, une consommation excessive de fructose peut augmenter le taux de triglycérides sanguins. A haute dose, les polyols peuvent provoquer des douleurs abdominales et des diarrhées.

Mais ce sont surtout les édulcorants «intenses» qui polarisent les interrogations. Aspartame, saccharine, acésulfame K, sucralose, ils ont un pouvoir sucrant des centaines voire des milliers de fois supérieur à celui du sucre. On les trouve associés entre eux, mais «on a peu d'indications sur leurs effets conjugués», dit le Dr Laurent Chevallier, nutritionniste et membre en France du Réseau environnement santé (Res).

Pour l'aspartame, présent dans plus de 6000 produits, la DJA est de 40 mg/kg de poids corporel/jour. Le seuil paraît élevé, mais «2 canettes + 1 yaourt + 1 crème + 4 cafés + 10 chewing-gums, ça fait déjà 15 mg/kg/jour», note André Cicolella, du Res.

Edulcorant intense naturel, la stevia, 200 fois plus sucrante que le sucre, a envahi le marché. Elle a obtenu un avis favorable de l'Agence sanitaire de l'alimentation (Anses), mais il ne faut pas la chauffer à plus de 100°C et des chercheurs regrettent le manque d'études la concernant.

Deux études récentes accusent les édulcorants intenses. L'une souligne qu'une forte consommation de boissons light par les femmes enceintes augmente le risque d'accouchements prématurés. L'autre confirme les résultats d'études antérieures sur l'impact cancérogène de l'aspartame sur les rats, et maintenant les souris.

Le Dr Chevallier cite le manuel Merck, bible des médecins : «L'absorption modérée d'aspartame pendant la grossesse ne semble entraîner qu'un faible risque foetal». «On veut pas de risque du tout», dit-il.

Sont-ils au moins efficaces pour maigrir ? Selon une étude de 2009, les utiliser peut inciter à manger plus pour être rassasié. Surtout, un produit allégé n'est pas forcément moins riche en calories qu'un produit ordinaire.

Hormis pour les boissons, où l'eau remplace le sucre, «quand vous retirez du sucre, vous remplacez par autre chose en termes de masse, comme de l'amidon ou du gras, et la valeur énergétique peut être plus élevée», note le Dr Chevallier. «Vérifiez les étiquettes!», recommande France Bellisle, de l'Institut national de la recherche agronomique (Inra).

Des chercheurs estiment même que les édulcorants font grossir, voire favorisent le diabète. Surtout, ils «encouragent la dépendance au sucre», dit une étude parue dans le Yale Journal of Biology and Medicine.

Nombre de nutritionnistes et diététiciens prônent donc une consommation modérée. Dans les cliniques de Montpellier où il officie, le Dr Chevallier a supprimé la sucrette avec le café. «Ça se passe très bien», assure-t-il.