Chaque semaine durant les quatre mois du programme Choisir de maigrir?, une quinzaine de femmes se réunissent pour discuter nourriture, poids santé, stéréotypes sociaux... et estime de soi.

«On regarde pour quelles raisons on mange, les comportements acquis face à la nourriture au fil des ans, les pressions sociales face à la taille. On discute aussi affirmation et estime de soi», explique Johanne Pelletier, intervenante sociale du programme au Centre des femmes de la Basse-Ville de Québec.«Nous enseignons à reconnaître les signaux de la faim et de la satiété. Trop manger, même avec des bonnes habitudes alimentaires, n'est pas recommandé», ajoute Anne Deslauriers, nutritionniste et animatrice du programme à la Clinique nutrition santé de l'INAF à l'Université Laval. Au total, 45 heures d'information, de mises en situation, d'ateliers, d'exercices divers.

On y traite aussi d'activité physique avec un kinésiologue. «Chaque participant tente de trouver sa façon de bouger, une activité qui lui plaira, et qu'il poursuivra», précise Mme Deslauriers.

Le Centre des femmes de la Basse-Ville a rebaptisé le programme Mon corps, ma nourriture, mes émotions, pour bien faire comprendre qu'il ne s'agit pas là d'une diète. Ni d'une méthode pour maigrir. Il s'agit plutôt d'une démarche personnelle.

Témoignages

Les diètes? France C. les connaît toutes. Weight Watchers, Minçavi, les pilules, les substituts alimentaires, elle a tout essayé. «Et j'ai repris le poids perdu, à chaque fois», dit-elle.

Découragée, elle s'est inscrite au programme Choisir de maigrir?, l'automne dernier. Ces quatre mois de réflexion sur ses rappports avec la nourriture ont changé sa vie.

«J'ai encore un surplus de poids. Mais j'ai compris pourquoi je mangeais, pourquoi je m'étais laissée aller pendant des années. J'ai constaté combien je mangeais mes émotions», explique France.

La démarche n'a pas été facile. «J'en ai pleuré un coup. Mais j'ai appris à faire face à mes bibittes. J'ai réalisé que je comblais mes vides par la bouffe, la cigarette, en aidant les autres et en ne pensant jamais à moi».

France C. fait du grand ménage, son ménage intérieur. Elle apprend à se respecter, à se laisser aimer. «Bientôt, je m'attaque à mon poids. J'y arriverai», dit-elle. Elle a compris qu'elle ne sera jamais une femme filiforme. Ces antécédents familiaux lui interdisent de rêver à cela. Elle vise un poids avec lequel elle sera confortable, qui allégera ses genoux.

Marguerite L. a suivi les ateliers Choisir de maigrir?, elle aussi, il y a deux ans. Son but n'était pas de perdre du poids, mais d'en prendre. «La nourriture était mon ennemie numéro un. Je sortais d'une crise d'anorexie», dit-elle.

Elle ressent encore aujourd'hui les bienfaits du programme. «J'ai effacé le mot régime de ma vie. J'ai guéri beaucoup de mes obsessions. Et surtout, j'ai repris le goût de manger», dit-elle.

Elle a pris un peu de poids. Juste ce qu'il faut pour se sentir bien.

Programme sous observation

Chercheuse à l'Institut des nutraceutiques et des aliments fonctionnels de l'Université Laval (INAF), Simone Lemieux a étudié le programme Choisir de maigrir? mis au point par l'organisme ÉquiLibre.

Cinquante femmes ont suivi le programme, 50 autres ont formé le groupe témoin.

Le programme atteint son objectif, estime la chercheuse, parce que les participantes ont amélioré leur comportement alimentaire. «Un an après la fin du processus, nous avons constaté que les femmes avaient moins tendance à manger lorsqu'elles étaient tristes ou anxieuses. Il leur arrivait moins souvent d'avoir l'impression de s'empiffrer. Elles perdaient moins le contrôle sur la nourriture», explique Mme Lemieux.

Même si l'objectif n'était pas la perte de poids, un an après avoir suivi le programme, 63 % des participantes avaient un poids plus faible qu'au début du programme. Elles ont perdu en moyenne 1,6 kg. Une petite perte de poids totalement maintenue lorsque les femmes sont mesurées un an après la fin de l'intervention.

Par contre, les participantes sont restées aussi obsédées par l'idée de «faire attention», de s'imposer des limites par rapport à l'alimentation. Une surprise pour la chercheuse. «Je pensais que les participantes se sentiraient libérées de la préoccupation du poids grâce au programme. Ce ne fut pas le cas», déplore Mme Lemieux.

Le défi de cette approche, c'est donc de la rendre attrayante, selon elle. La tâche n'est pas facile dans une société qui «juge les gens selon leur format et dans laquelle les gros ont la vie dure».