Mélanie enseigne la deuxième année à l'école primaire de son quartier. Récemment, elle a observé un changement de comportement chez Alexis, un des élèves de sa classe. Il est replié sur lui-même, il semble préoccupé et, la semaine dernière, il s'est battu avec un autre élève, chose qu'il n'aurait jamais faite auparavant. Quelques jours plus tard, lors de la réunion avec les parents, Mélanie apprend que la mère d'Alexis est victime de violence conjugale et que l'enfant est témoin de plusieurs conflits violents. Elle voit cette confidence de la part de cette maman comme une marque de confiance, mais également comme un appel à l'aide. Elle aimerait pouvoir l'aider à se sortir de cette situation, mais elle ne sait pas trop comment l'aider... Elle se demande ce qu'elle peut faire pour eux.

La violence conjugale peut toucher les gens de tous les niveaux socioéconomiques et n'est pas toujours apparente aux yeux de l'entourage des victimes. Pour donner quelques chiffres, notons qu'en 2000, on dénombrait au Québec près de 16 000 victimes de crimes contre la personne commis dans un contexte conjugal et 85 % des victimes étaient des femmes (ministère de la Sécurité publique; la violence conjugale : statistiques 2000).Vous pouvez sûrement vous douter des conséquences négatives de la violence conjugale sur les femmes (et les hommes) qui en sont victimes. Mais aujourd'hui, j'aimerais vous informer des conséquences de la violence conjugale sur les enfants parce que des études indiquent que la majorité des enfants des femmes victimes d'agression sont présents lorsque le conjoint inflige des blessures et des souffrances à leur mère. En effet, il semble que 75 % d'entre eux sont témoins, 20 % y participent et 11 % subissent des agressions physiques (Larouche, 1987; Sudermann et Jaffe, 1999).

Si le simple fait d'être témoin de conflits non violents entre ses parents peut être très difficile pour un enfant alors imaginez à quel point être témoin de violence conjugale sera dévastateur pour son développement et son bien être.

Comme Mélanie, les gens qui travaillent auprès des jeunes peuvent parfois être témoins de changements d'attitude ou de comportement chez un enfant, sans nécessairement pouvoir déterminer qu'il s'agit d'une réaction à la violence qui se vit en famille. Certains enfants parleront de ce qui se passe à la maison, mais d'autres voudront garder le secret, sentant que leur sécurité et celle de leur parent-victime sont menacées.

Il faut donc lire entre les lignes et se montrer à l'écoute de tout enfant qui manifeste un ou plusieurs des signes suivants :

> agressivité, agitation, impulsivité;

> irritabilité, réactions violentes lors de conflits;

> opposition face à l'autorité;

> difficulté sur le plan scolaire (faibles résultats scolaires, difficulté à se concentrer);

> comportements délinquants (mensonges, vandalisme, décrochage scolaire, fugues...);

> état dépressif, anxiété, idées suicidaires;

> difficultés dans les relations sociales, tendance à s'isoler.

Je donne ces signes à titre indicateur seulement, car il est important de comprendre que les réactions à la violence conjugale peuvent varier d'un enfant à l'autre, et il y a même des enfants, particulièrement résilients, qui ne développeront aucun de ces signes. Quand un enfant présente une ou plusieurs des caractéristiques de la liste ci-dessus, le fait de créer un climat de confiance avec lui pourrait l'encourager à se confier, ce qui lui ferait le plus grand bien, même si cela n'implique pas nécessairement une amélioration de sa situation familiale. Il est également important de comprendre qu'un enfant qui manifeste ces signes peut le faire pour toutes sortes d'autres raisons que la violence entre ses parents. Toutefois, il s'agit probablement d'un enfant qui vit une autre forme de problème et qui a tout autant besoin de votre écoute.

Dans le cas où l'adulte victime de violence conjugale vous confie ce qu'il vit, il peut être normal de ne pas savoir comment l'aider et même d'hésiter à s'en mêler... Plusieurs se diront : «Ce n'est pas de mes affaires.» Pourtant, de simples gestes comme écouter et faire connaître les ressources qui existent pour les victimes sont des gestes qui peuvent faire une grande différence.

Si vous voulez en savoir plus sur la violence conjugale et sur les ressources qui existent pour les familles qui vivent cette réalité, je vous conseille de visiter les sites suivants :

- www.msss.gouv.qc.ca/sujets/prob_sociaux/violenceconjugale.php

- www.violenceconjugale.gouv.qc.ca

- www.sosviolenceconjugale.ca