Faut-il pratiquer des tests génétiques chez les enfants? La question fait débat aux Etats-Unis, où les demandes ne cessent d'augmenter, notamment chez les enfants de femmes possédant un gène de susceptibilité au cancer du sein (BRCA).

Environ 100 000 tests de détection de mutations génétiques liées au cancer du sein ont ainsi été enregistrés l'an dernier, soit deux fois plus qu'en 2005. Un chiffre qui devrait encore grossir du fait de l'extension de la couverture sociale et d'une nouvelle loi interdisant la discrimination génétique.

Les experts médicaux sont généralement opposés aux tests pratiqués avant l'âge de 25 ans, jugeant que peu de choses peuvent être faites pour prévenir ou dépister ces cancers avant cet âge, et que le savoir ne pouvait qu'être source d'inquiétude inutile. Une affirmation que contestent de nombreuses personnes porteuses de mutations du gène BRCA, mais aussi leurs enfants.

Jenna Stoller, étudiante à l'Université Cornell (New York), en fait partie. «Je suis le genre de personne, comme ma mère, à préférer connaître les choses qui me concernent plutôt que le contraire», résume la jeune fille testée positive en début d'année, peu après son 18e anniversaire. Sa mère l'a fait attendre cinq ans après avoir appris sa propre mutation, bien que Jenna ait alors souhaité être testée.

La recherche montre aussi les bénéfices à tirer de cette connaissance, comme l'arrêt du tabac pour certains. On a conseillé à d'autres, comme Jenna Stoller, de limiter leur consommation d'alcool et d'éviter de prendre la pilule, un facteur de risque de cancer du sein, bien que la pilule diminue celui de cancer de l'ovaire.

Dix ans après les premiers tests de dépistage du BRCA, les chercheurs commencent tout juste à découvrir les répercussions de la positivité d'un patient sur le reste de sa famille. Une question se pose, celle de l'éthique et du bien-fondé du test chez les mineurs.

Les hommes aussi peuvent être porteurs de la mutation BRCA, et si chaque parent l'est, l'enfant a 50% de risques d'en hériter. Les femmes porteuses présentent un risque de cancer du sein 3 à 7 fois supérieur à celui des autres, et un risque accru de cancer de l'ovaire. Chez les hommes, ce sont la prostate, le pancréas et d'autres types de cancer qui augmentent.

Pour réduire ce risque, on conseille aux femmes de se faire retirer les seins et les ovaires. Des gestes chirurgicaux qui ne peuvent pas être réalisés chez des femmes très jeunes. Même les mammographies sont contre-indiquées avant 25 ans, le cancer étant rare avant cet âge.

«La règle est de ne pas faire de mal, de ne faire le test que si vous avez quelque chose à proposer», souligne Mary-Claire King, de l'Université de Washington, qui a découvert le BRCA1, une prédisposition génétique au cancer du sein. Ce qui n'empêche pas certains parents de tester leurs filles bien avant la puberté, parfois dès l'âge de 4 ans.

Jenna a eu droit à des heures d'assistance psychologique avant d'obtenir l'accord du médecin. Jennifer Scalia Wilbur, psychologue au Women and Infants Hospital de Providence (Rhodes Island), raconte qu'une jeune fille de 19 ans n'ayant pas bénéficié de ce soutien veut qu'on lui retire les seins et ne veut plus d'enfant.