Dès sa parution, en 2005, Les aliments contre le cancer a suscité un engouement spectaculaire : le livre, qui abordait l'effet « chimiopréventif » de certains aliments, s'est vendu à 400 000 exemplaires. Il a été traduit dans plus de 25 langues.

L'ouvrage des chercheurs Richard Béliveau et Denis Gingras était très étayé scientifiquement, mais son approche a suscité une part de scepticisme. À l'émission Enjeux, en novembre 2005, des scientifiques avaient affirmé que les effets de ces aliments sur les cellules cancéreuses avaient été observés en laboratoire et qu'il était tôt pour conclure que ces aliments pouvaient aider à prévenir le cancer chez l'humain.

Dix ans plus tard, les éditions Trécarré viennent de publier une deuxième édition « revue et augmentée » des Aliments contre le cancer. Cette deuxième édition fait le point sur les progrès dans la compréhension du cancer, identifie des aliments chimiopréventifs émergents et présente les résultats de nombreuses études publiées au cours de la dernière décennie.

Quand on lui rappelle les commentaires des scientifiques qui parlaient en 2005 d'une absence de preuve, Richard Béliveau, aussi passionnant que passionné en entrevue, s'anime.

« Ceux qui ont dit ça, c'est faux, résume le docteur en biochimie et directeur du laboratoire de médecine moléculaire à l'UQAM. Ce n'est pas parce qu'on ignore quelque chose que la chose n'existe pas : il y avait des études populationnelles [avant 2005]. »

« Et depuis, ajoute-t-il, elles ont augmenté de façon hallucinante. »

Richard Béliveau explique qu'en 2007, le Fonds mondial de la recherche sur le cancer (« une mégastructure qui coordonne les activités de la recherche sur le cancer à l'échelle mondiale ») a publié un rapport exhaustif qui compilait 400 000 études (et dont les conclusions du chapitre sur la nourriture et les boissons rejoignent celles des auteurs québécois).

Consultez le rapport.

« Depuis, il y a de grandes études prospectives qui ont été faites en appliquant les recommandations du Fonds mondial de la recherche sur le cancer du point de vue alimentaire », indique-t-il.

Richard Béliveau cite une étude espagnole menée auprès de 4300 femmes et publiée en 2015 dans la revue JAMA Internal Medicine. Après un suivi de cinq ans, les femmes qui avaient suivi un régime méditerranéen comprenant de l'huile d'olive extravierge avaient une diminution de 70 % de risque de cancer du sein.

« Je trouve incroyable que ces données soient publiées et qu'on se pose des questions », dit Richard Béliveau, en référence au rapport de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, en France, qui a conclu en 2011 qu'il n'existe pas d'aliment ou de nutriment anticancer en soi.

Consultez le rapport.

« C'est le même combat, dans une négation de faits qui sont publiés. Ce sont des milliers d'études qui montrent ça », poursuit-il.

Richard Béliveau rappelle que les connaissances à propos du pouvoir anticancer de certaines molécules contenues dans des végétaux ne datent pas d'hier : « 50 % des médicaments de chimiothérapie sont d'origine végétale aujourd'hui en clinique », dit-il. « Ce qui ne rentre pas dans la tête des gens, poursuit-il, c'est que certains aliments que l'on consomme - fruits et légumes, épices aromates, thé vert - contiennent des molécules qui ont des actions anticancéreuses. C'est ça qui est un non-sens. »

Richard Béliveau le répète : on parle ici de prévention du cancer, et non de guérison. Et les molécules anticancéreuses contenues dans les aliments à l'honneur dans son livre agissent sur certains types de cancer, et non sur l'ensemble des cancers.

Un climat favorable

Depuis 10 ans, la compréhension du cancer a grandement évolué, constate Richard Béliveau. En 2005, se souvient-il, on commençait à voir le cancer comme une maladie chronique, et ça s'est confirmé « de façon spectaculaire ».

« Et c'est ce qu'il faut changer dans la tête des gens : les gens pensent qu'ils attrapent un cancer à 65 ans, mais ce n'est pas le cas : le cancer qu'ils ont dans le colon, le sein ou la prostate à 65 ans, il a commencé à pousser quand ils avaient 18, 20, 22 ans. »

Pour limiter les risques que les microtumeurs (que 100 % des gens auraient dès la sortie de l'adolescence !) évoluent en cancer cliniquement déclaré, il faut cultiver un bon environnement dans son corps. « Et c'est là que l'hygiène de vie joue », conclut Richard Béliveau.

Cinq aliments chimiopréventifs

L'huile d'olive

L'effet protecteur de l'huile d'olive - notamment contre les cancers de l'utérus et du sein - serait lié à la présence de composés phénoliques antioxydants et anti-inflammatoires.

Le café

Les personnes qui consomment régulièrement du café auraient, selon une étude, 40 % moins de risques d'être touchées par le cancer du foie. Le café aurait aussi un effet protecteur contre le cancer du sein.

Les fibres

La dégradation des fibres dans l'intestin mène à la production de certains acides gras qui ont un puissant effet anti-inflammatoire sur le système immunitaire et une action anticancéreuse (protection pour les cancers du foie, du côlon et du sein).

Les pêches et les nectarines

La consommation régulière de pêches et de nectarines est associée à une réduction de 40 % de certains types de cancer du sein.

La grenade

La grenade contient des polyphénols, des molécules qui diminuent les taux de PSA, un marqueur de la progression du cancer de la prostate.