Après les autorités allemandes, danoises, néo-zélandaises et européennes, deux agences gouvernementales françaises viennent de rendre un verdict dévastateur au sujet d'une récente étude qui établissait un lien entre la consommation de maïs transgénique et le cancer. Le Haut Conseil des biotechnologies (HCB) et l'Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) ont en effet affirmé hier que les conclusions de l'étude en question, qui a fait les manchettes à la mi-septembre, sont invalides en raison de faiblesses méthodologiques.

Les deux avis publiés réclament toutefois la reprise, d'une manière adéquate cette fois, de l'étude dont les résultats ont été publiés dans la revue Food and Chemical Toxicology.

Il s'agit d'une victoire relative pour l'auteur principal de l'étude controversée, Gilles-Éric Séralini, de l'Université de Caen, qui milite contre l'agriculture transgénique depuis plus d'une décennie. Il a d'ailleurs lancé un livre, Tous cobayes!, et un documentaire sur le sujet cet automne.

Le biologiste normand et ses collègues ont observé que les rats nourris de moulée faite de maïs génétiquement modifié (OGM) souffraient et mouraient davantage du cancer que les rats nourris à la moulée sans OGM.

Au départ, M. Séralini voulait se pencher sur des marqueurs de toxicité biologique. Le HCB note que l'étude met l'accent sur les 6 paramètres qui sont les plus concluants - parmi les 48 évalués - et que la variabilité naturelle de ces paramètres n'est pas bien prise en compte.

Citoyens inquiets

Une nouvelle étude sur la sécurité du maïs transgénique est donc nécessaire devant les «interrogations des citoyens à la suite de la médiatisation à outrance des travaux de Gilles-Éric Séralini», conclut le HCB, qui gère notamment les demandes d'étude sur les OGM en France.

M. Séralini a par ailleurs évité de faire une demande au HCB en obtenant son maïs génétiquement modifié d'un «collège agricole canadien» dont le nom n'a pas été dévoilé. Dans Tous cobayes!, l'auteur indique avoir pris plusieurs précautions semblables car il craignait que la société Monsanto, qui fabrique les semences étudiées, ne force ses supérieurs à lui interdire de terminer son projet.

De son côté, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a conclu au début du mois d'octobre que l'étude de M. Séralini était de «qualité scientifique insuffisante», de sorte qu'il n'est pas nécessaire de réévaluer l'autorisation donnée au type de maïs OGM étudié. L'EFSA a publié hier un communiqué dans lequel elle déplore le fait que les chercheurs de Caen ne lui ont toujours pas fourni leurs données.

Dans des entrevues, M. Séralini a affirmé qu'il ne voyait pas pourquoi il rendrait ses données publiques alors que les données soumises à l'EFSA par les fabricants de semences ne le sont pas. Il n'a pas été possible de lui parler hier.