Le burn-out, ou syndrome d'épuisement professionnel, guette les salariés soumis à d'intenses pressions et un stress permanent, un phénomène des temps modernes qui inquiète notamment médecins du travail et syndicalistes.

Au Japon, le «karoshi», ou «mort par surmenage» de salariés se tuant littéralement à la tâche, est reconnu comme accident du travail depuis les années 70.

En France, le syndrome n'est pas, lui, reconnu comme une maladie professionnelle et, faute de statistiques, son ampleur exacte n'est pas identifiée. Mais les spécialistes le connaissent bien.

«Le burn-out est nécessairement lié au travail : c'est un sur-engagement professionnel caractérisé par un épuisement émotionnel, une perte d'estime de soi et la déshumanisation de la relation à l'autre», expliquait le dr Agnès Martineau-Arbes, lors d'un récent colloque sur ce syndrome.

Pour ce médecin du travail, le terme anglais résume bien l'état d'une personne qui «se consume, physiquement et moralement jusqu'à épuisement total, jusqu'à avoir brûlé toutes ses réserves». Il atteint des personnes «extrêmement engagées dans leur travail et qui veulent bien faire», précise-t-elle.

«Exposé à un stress permanent, le salarié n'arrive pas à décrocher, augmente les cadences (...). Il en fait de plus en plus pour des résultats de moins en moins bons. Pour finir, le salarié acquiert la conviction qu'il est devenu incapable de faire son travail», résume Mme Martineau-Arbes.

Les signaux d'alarme sont, pêle-mêle: troubles du sommeil, fatigue, perte de mémoire et de concentration, symptôme dépressif, problèmes de dos, d'ulcères, hypocondrie, irritabilité et une anxiété qui peut aller jusqu'à la panique. Il y a aussi souvent abus d'alcool, de cigarettes et de drogues.

«Le traitement est long et difficile»

Pour l'initiateur du colloque, Jean-Claude Delgènes, directeur du cabinet de prévention des risques professionnels Technologia, «les exigences de la vie professionnelle sont de plus en plus fortes» et mettent les salariés «sous pression».

Il cite le contexte professionnel actuel qui se durcit avec un «chômage de masse qui dure, de nouvelles organisations du travail aggravées par l'exigence de rentabilité, des objectifs de moins en moins réalistes et une gouvernance non-respectueuse de l'humain».

M. Delgènes évoque également les nouvelles technologies de l'information qui «font le terreau» du burn-out parce que le «temps de la production ne s'arrête jamais».

«Le burn-out est un sujet qu'il faut prendre à bras-le-corps, il y a déjà eu trop de drames dans l'entreprise», alerte Sébastien Busiris (FO). Il plaide pour sa reconnaissance en tant que maladie professionnelle, comme ses homologues syndicalistes (CFDT, CGT, CFE-CGC) présents lors du colloque.

Le syndrome, qui auparavant visait surtout les personnes dont l'activité impliquait un contact relationnel important comme les enseignants ou les professions médicales, touche depuis dix ans toutes les catégories professionnelles, selon les spécialistes.

Pour ces derniers, médecins du travail et représentants du personnel devraient tisser un filet de protection autour des salariés en négociant des accords de prévention et en ouvrant le débat dans l'entreprise.

Le dépistage «est extrêmement complexe, et une fois diagnostiqué, le traitement est long et difficile», prévient le Dr Martineau-Arbes. «Le retour au travail peut parfois prendre des années. On ne sort pas indemne d'un burn-out, on en garde des traces et des séquelles», conclut le médecin du travail.