La danse et la maladie de Parkinson, un couple insolite, et pourtant: chaque semaine, Michael et Roslyn Lieb, tous deux retraités et atteints de cette affection dégénérative du cerveau, se rendent à un cours de danse conçu pour les parkinsoniens.

Depuis trois ans, sur les conseils d'une infirmière, le couple fréquente Hubbard Street, des cours lancés il y a sept ans par Sarah Cullen Fuller, à l'image du Mark Morris Dance Group de New York.

Le tremblement parkinsonien, la raideur et les mouvements saccadés caractéristiques de la maladie, semblent difficilement compatibles avec la danse. Mais faire de l'exercice est parfois recommandé aux personnes malades, notamment pour améliorer la souplesse des articulations. Les spécialistes s'intéressent d'ailleurs aux bénéfices que la danse peut apporter aux malades

Pour les Lieb, la réponse est claire. «Ça remonte le moral», résume Roslyn Lieb, 69 ans. «La danse nous transporte sur une planète différente sur laquelle le Parkinson n'a pas autant d'importance».

«Nous laissons notre maladie à la porte, ne formons plus qu'une communauté de soutien mutuel et nous dansons ensemble», renchérit son mari, un homme âgé de 71 ans. «C'est simplement une expérience merveilleuse».

En trois ans, les cours sont passés d'une douzaine d'élèves à trente et parfois plus. Les élèves sont d'anciens éducateurs, des scientifiques, des médecins, «et bien d'autres», souligne Sarah Cullen Fuller. Parmi les exercices, des pas de tango, accompagnés de figures empruntées au ballet classique ou plus modernes.

S'ils ne peuvent être confondus avec Baryshnikov, ou tout autre danseur, même amateur, de l'émission «Danse avec les stars», les élèves bougent de façon émouvante, poignante. Certains sont en chaise roulante, ou peuvent à peine bouger sans l'aide de leurs partenaires. Récemment, pendant un cours, un homme se tenait debout derrière la chaise roulante de sa femme, se penchant pour caresser ses bras immobiles en musique.

«Ils savent qu'ils ne sont pas danseurs, alors que je les vois comme des danseurs. Je ne vois pas la maladie -j'essaie de ne pas la voir. J'essaie de ne pas la laisser pénétrer dans la pièce», poursuit Sarah Cullen Fuller.

Michael Lieb est un spécialiste réputé du poète britannique John Milton, et a longtemps été professeur à l'Université de Chicago, dans l'Illinois. Roz a travaillé comme avocate en droit public.

Leur maladie est moins avancée que chez d'autres élèves. Mais le cours de danse est devenu un des meilleurs moments de leur semaine. Que les bénéfices qu'ils en tirent soient physiques, psychologiques, ou les deux, pour Michael Lieb, danser a «mobilisé quelque chose chez moi qui me donne envie de continuer, et tant que ce sera efficace, je continuerai».

La maladie de Parkinson se caractérise par une perte des neurones qui contrôlent le mouvement. Outre le tremblement, elle entraîne une rigidité, une marche difficile, ralentit le débit de parole et entraîne parfois une démence». Les symptômes s'aggravent avec le temps, et peuvent être améliorés avec un médicament, mais il n'y a pas de traitement.

Un million de personnes, environ, sont touchées aux États-Unis, et six millions à l'échelle mondiale, selon la National Parkinson's Foundation. Si la cause reste inconnue, les gènes semblent jouer un rôle.

La danse, parce qu'elle s'accompagne de musique, est bénéfique au-delà des autres formes d'exercice, notamment par la socialisation qu'elle apporte à des personnes par ailleurs isolées par leur maladie, résume le Pr Daniel Tarsy, directeur du centre de la maladie de Parkinson à Boston.

«Quand vous écoutez de la musique, ça transporte les parties émotionnelles de votre cerveau, en quelque sorte», explique-t-il. «a peut aider à court-circuiter les cellules endommagées, rendant le mouvement plus facile». Le Pr Tarsy chercher à déterminer s'il y a une réelle amélioration au niveau cérébral.

Selon les résultats d'une étude menée par Gammon Earhart, spécialiste du Parkinson à l'Université de Washington, pratiquer le tango deux fois par semaine semble accélérer la marche et diminuer la raideur des articulations.

Michael Lieb a pris sa retraite d'enseignant à cause de la maladie. «Personne ne sait de quoi l'avenir sera fait», et c'est ce qui m'inquiète le plus, ajoute Roslyn Lieb. «J'ai un but, danser aux mariages de mes petits-enfants».