Tenue en méfiance par une grande partie du corps médical, l'homéopathie fait une entrée discrète à l'hôpital, où des médecins la prescrivent en appoint de traitements lourds comme en cancérologie, sur la base pour les plus sceptiques de sa vertu supposée magique de placebo.                              

Face à l'engouement des malades, des praticiens ont fait ce choix dans plusieurs hôpitaux de France, comme à Lyon, au centre de lutte contre le cancer Léon-Bérard.

Parmi eux, le cancérologue Thomas Bachelot qui, tout en se définissant comme un «sceptique de l'homépathie», utilise ces médicaments pour soulager les effets secondaires des chimiothérapies et radiothérapies comme les nausées.

«L'homéopathie, c'est une bonne approche thérapeutique, une façon intelligente de prendre en charge les patients: ça marche parce que les gens aiment qu'on les écoute», explique-t-il.

«Je dis aux patients que je ne vois pas trop comment ça marche d'un point de vue scientifique. Pour moi, ça reste très poétique, sans base rationnelle. Mais ça marche parce que les gens aiment la magie», ajoute-t-il.

Avec des confrères, il s'est néanmoins lancé dans des études pour tenter d'évaluer l'impact des substances homéopathiques, au-delà de l'effet placebo.

Menées auprès de centaines de patients, ces études, cofinancées par les laboratoires homéopathiques Boiron mais menées en toute indépendance assure cet établissement de référence, ont eu des résultats variables.

Une crème au calendula s'est ainsi révélée bien plus efficace que la classique Biafine employée pour soulager les brûlures de la peau consécutives aux radiothérapies.

Une autre étude, sur la cocculine, a noté une baisse significative des nausées. Seul hic, même si la baisse est troublante: elle est la même chez les patients ayant pris un placebo et des comprimés homéopathiques.

De quoi nourrir les arguments des détracteurs de l'homéopathie, selon lesquels sa caractéristique principale (plantes ou minéraux dilués à l'extrême) serait une escroquerie.

Installé près de Lyon, Boiron, leader mondial du médicament homéopathique, déplore ce scepticisme au sein de la communauté scientifique.

Selon Boiron, les praticiens prescrivant des médicaments homéopathiques (dont plus de 10.000 sont remboursés par la Sécurité sociale) se comptent désormais par milliers en France, alors que se sont multipliées les formations, y compris au sein des facultés de médecine et de pharmacie.

«L'homéopathie se banalise, avec des patients qui viennent à une consultation d'homéopathie comme ils vont chez le psy ou la diététicienne. Mais les consultations homéopathiques, ça reste peanuts en milieu hospitalier», témoigne Marie-France Bordet, médecin homéopathe à l'hôpital de la Croix-Rousse, et par ailleurs salariée de Boiron.

Au sein du service d'hépatologie de ce grand CHU lyonnais, elle suit essentiellement des patients atteints d'hépatite C, souffrant d'effets indésirables de leurs traitements comme des problèmes de peau ou de toux.

A l'origine de sa consultation se trouve la volonté d'un chef de service de «proposer l'homéopathie à domicile», à l'hôpital, pratiquée par de vrais médecins, pour éviter que les patients en souffrance ne se retrouvent victimes de charlatans.

«L'homéopathie, c'est une méthode thérapeutique et non une médecine à part entière. Si un patient a besoin d'antibiotiques ou de corticoïdes, je lui en prescris!», ajoute-t-elle, loin de la caricature de l'homéopathe fustigeant vaccins comme antibiotiques.