Après plus de deux ans d'efforts pour parvenir à attacher les ficelles, le ministre Yves Bolduc a donné le coup d'envoi, hier, à la première phase d'un programme universel de dépistage du cancer colorectal. Le programme ciblera les hommes et les femmes âgés de 50 à 74 ans, avec la collaboration de huit établissements de santé de la province.

Dans la région métropolitaine, le personnel médical de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, du CUSM, de Pierre-Boucher et du CSSS du Sud-Ouest-Verdun sera mis à contribution. Le programme sera aussi à l'essai dans les régions de Québec, Rivière-du-Loup et Arthabaska. Les personnes ciblées par le test de dépistage, qui consiste dans la détection de traces de sang dans les selles, recevront une lettre par la poste leur expliquant la procédure à suivre.

Si le programme d'une durée de 12 à 18 mois se déroule sans anicroche, il sera implanté de façon permanente, un peu à l'image du programme de dépistage du cancer du sein, offert aux deux ans. Dans le cas du cancer colorectal, cependant, le test de dépistage initial ne nécessite pas tout l'appareil comme les mammographies, mais il peut en aller tout autrement s'il s'avère positif et entraîne une coloscopie.

À cet égard, le gouvernement s'est engagé à surveiller de près comment les établissements arriveront à répondre à la demande supplémentaire en coloscopies générée par le dépistage. Dans certaines régions du Québec, on a déjà observé des délais d'attente allant jusqu'à un an pour obtenir ces examens plus poussés.

À l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, par exemple, le Dr Jean-Charles Rioux, gastroentérologue, explique que son département reçoit 60 demandes par jour de cliniques pour des consultations, sans compter les demandes de l'hôpital. «Environ le tiers nécessite une coloscopie de dépistage, dit-il. Il est clair qu'il va nous falloir au moins une autre infirmière et un préposé pour le transport. On aura aussi besoin d'un rehaussement de nos équipements, mais on peut y arriver en travaillant différemment, en augmentant notre efficacité.»

Redevenir un chef de file

L'Ontario offre déjà le dépistage systématique du cancer colorectal. Mais selon le ministre Bolduc, joint avant d'entrer en Chambre, hier, le Québec se démarquera en utilisant un nouveau test immunochimique beaucoup plus sensible. «Il est aussi beaucoup plus facile à analyser, a-t-il ajouté. Il est clair qu'on peut devenir un chef de file en la matière au Canada, voire dans le reste du monde.»

Le cancer colorectal est au deuxième rang des cancers les plus mortels en Amérique du Nord, après celui du poumon. Au Québec, on estime qu'une personne sur 17 en sera atteinte au cours de sa vie, et on dénombre jusqu'à 2500 décès chaque année. La cible du gouvernement est de diminuer de 17% la mortalité liée à cette maladie.

Les 2,7 millions de dollars nécessaires à l'implantation du programme ne représentent donc pas un investissement énorme s'il permet de sauver des vies, précise le ministre de la Santé. Les personnes de 50 ans et moins ne sont pas visées par le programme, mais elles devraient passer le test de dépistage si l'un des membres de leur famille a souffert de cancer colorectal, a-t-il ajouté.

À cet égard, l'Institut national de la santé publique du Québec a publié un rapport, en 2008, dans lequel on recommandait la mise sur pied d'une sorte de registre permettant aux personnes diagnostiquées d'y inscrire les membres de leur famille. Ce même rapport, qui a servi de guide au gouvernement, spécifiait que le médecin de famille devrait être un point d'entrée au dépistage chez les personnes à haut risque, en informant le patient et l'orientant vers les services cliniques appropriés.