Alors qu'en France les grandes sociétés sont poussées à prévenir le stress de leurs salariés, un mouvement se fait jour dans l'ensemble de l'Union européenne, où les législations contraignent de plus en plus les entreprises à prendre en compte les risques dits psychosociaux.

Sous ce terme sont rassemblés tous les troubles de santé (stress, dépression..) liés au travail, autres que les accidents purement physiques, découlant par exemple de l'insécurité de l'emploi, de l'intensification du travail ou du mauvais équilibre vie privée vie professionnelle.

«Les législations communautaires et nationales imposent» que ces risques soient intégrés plus systématiquement «à part entière dans leurs politiques de prévention», indique une étude du groupement d'intérêt public Eurogip créé par la sécurité sociale française.

Dans l'UE, 28% des travailleurs seraient «exposés à au moins un facteur susceptible d'affecter de manière défavorable (leur) bien-être mental», rappelle Eurogip, se fondant sur des statistiques européennes.

Ces taux de stress montent à 38% en Suède, 28% au Portugal, 27% en Italie et au Danemark, 18% en France, mais la reconnaissance de ces problèmes est plus ou moins facile selon les pays. Par secteur, c'est l'éducation, suivie par la santé et l'action sociale, qui sont les plus touchés.

Le stress coûte cher aux entreprises

Entre 50 et 60% des journées de travail perdues en Europe ont un lien avec le stress. En 2002, la Commission européenne avait chiffré à 20 milliards d'euros le coût annuel du stress lié au travail dans l'UE à 15.

Patrick Légeron, du cabinet de conseil français Stimulus, recommande aux pouvoirs publics de montrer que combattre le stress est «bon pour le business». «Nokia en Finlande a calculé que son retour sur investissement était de 1 à 3», relève-t-il.

Eurogip observe que certains pays comme la Belgique, le Danemark, la France et le Royaume-Uni ont placé cette lutte parmi leurs priorités. La panoplie des mesures comporte aides financières, formations et renforcement de l'inspection du travail.

Le Danemark s'est fixé pour objectif de réduire de 10% à la fin 2010 l'absentéisme dû aux maladies liées au stress.

La France «a eu du retard à l'allumage» mais «il y a une vraie dynamique depuis deux ans», explique Philippe Douillet de l'Anact (agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail).

En octobre, le gouvernement avait enjoint aux entreprises de plus de 1000 salariés d'entamer des négociations ou des démarches de prévention du stress. Il s'est engagé à désigner la semaine prochaine les bons et mauvais élèves.

Au niveau de l'Union européenne, plusieurs directives, qui imposent le même cadre juridique aux Etats membres, ont été prises depuis 1989 sur les risques psychosociaux et deux accords cadres européens, peu à peu transposés dans chaque pays, ont été conclus par les partenaires sociaux, en 2004 sur le stress et en 2007 sur le harcèlement et la violence au travail.

En France, le premier a débouché sur un accord interprofessionnel en novembre 2008, suivi de peu d'effets jusqu'à l'injonction gouvernementale d'octobre, le second fait l'objet de négociations ardues, le patronat refusant de faire le lien que réclament les syndicats entre organisation du travail et violence.

Pourtant, au niveau européen et dans la plupart des pays, c'est la prévention organisationnelle qui est recommandée;

Eurogip préconise de combiner cette approche avec une prévention individuelle, via des formations à la gestion du stress ou des groupes d'écoute.