La pollution est-elle responsable du diabète?

Selon plusieurs chercheurs, l'hypothèse mérite d'être envisagée. Fort heureusement, les polluants en cause sont de moins en moins utilisés dans les pays riches, ce qui permet d'espérer que la maladie cessera éventuellement de progresser.

«Quand j'ai vu les chiffres, je n'en revenais pas», explique David Jacobs, un épidémiologiste de l'Université du Minnesota qui a publié plusieurs études sur le sujet dans les dernières années.

 

«Je m'occupe de maladies chroniques. C'était la première fois que je m'occupais de pollution. Le risque peut augmenter jusqu'à 40 fois chez les personnes ayant de fort taux de polluants organiques persistants. Il est impossible que ce soit une erreur statistique. Tout ce qui reste à prouver, c'est qu'il y a un lien causal entre ces polluants et le diabète. Il pourrait s'agir d'une coïncidence, que le même problème cause le diabète et facilite l'absorption de ces polluants.»

Les polluants organiques persistants, ou POP, ont été longtemps utilisés comme pesticides. Leur représentant le plus connu est le DDT. Une douzaine de POP sont interdits, sauf permission spéciale seulement accordée à des pays en voie de développement, par un traité international. Leur nom provient du fait qu'ils restent très longtemps dans l'environnement - ou dans les cellules humaines ou animales- sans être dégradés, une caractéristique utile pour des pesticides mais qui en fait des polluants très puissants.

«L'association entre les POP et le diabète a tout d'abord été faite par les chercheurs qui se penchaient sur les conséquences à long terme des accidents industriels comme celui de Seveso ou sur les vétérans du Vietnam, qui ont été exposés à de fortes doses de défoliants», explique le Dr Jacobs, en entrevue depuis Oslo où il participait à une réunion sur le sujet.

«Avec des chercheurs coréens, j'ai tenté de voir s'il était possible de détecter le même lien dans la population en général. J'ai vu qu'aux États-Unis, c'était le cas. Des personnes obèses n'ont pas de risque de diabète si elles ont peu de POP accumulés dans le corps.»

Le mécanisme liant diabète et POP est encore mal connu, mais il impliquerait tout de même l'obésité.

«Les cellules adipeuses semblent être des sites de stockage importants pour les POP», explique la coauteure du Dr Jacobs, Duk-Hee Lee, de l'Université national Kyungpook, en Corée.

«De là, ils pourraient causer des dysfonctions métaboliques dans les mitochondries, des régions des cellules humaines qui sont responsables de la production d'énergie. Les mitochondries jouent probablement un rôle dans le diabète.»

Pour confirmer le lien, l'épidémiologiste coréenne veut maintenant voir si les pays qui utilisent toujours les POP comme pesticides sont plus à risque de diabète.

Des milliards de dollars en coûts

Le diabète représente près de 10% des coûts de santé au Canada.

Selon une étude récente de l'Université de l'Alberta, ils ont connu depuis 2000 une augmentation qui atteindra 40% en 2010 au Québec et continueront à grimper jusqu'à 2 milliards en 2016.

La Fondation canadienne de la recherche sur le diabète juvénile, elle, estime que les coûts réels, incluant les problèmes que connaissent les diabétiques qui s'ignorent, sont deux fois plus élevés et dépasseront 15 milliards en 2010.

En 2003, une étude du même chercheur de l'Université de l'Alberta avait estimé que les diabétiques représentent des coûts pour le régime public de santé qui sont quatre fois plus élevés que la moyenne de la population, notamment parce que de nombreuses hospitalisations pourraient être évitées grâce à un meilleur suivi de la maladie.