Les troubles alimentaires comme l'anorexie et la boulimie sont laissés pour compte au Canada, affirme l'Association des psychiatres du Canada. Ces maladies psychiatriques pourraient faire une soixantaine de morts par année au Québec.

«Il n'y a presque pas de places dans le système public pour le traitement de ces troubles», dénonce le Dr Blake Woodside, président du conseil de direction de l'Association, qui pratique à Toronto dans ce domaine. «Les gens doivent aller au privé, mais ça peut coûter 1000$ par jour, pour une durée de traitement de 90 à 120 jours. De plus, très peu de psychiatres et de médecins de famille sont formés pour ce type de maladie, alors les gens qui consultent en externe doivent aller au privé, où il y a d'excellents professionnels, mais dont les services sont coûteux. Les assurances privées remboursent en partie ces frais, mais peu de Canadiens en ont.»

Le Dr Woodside a donné une entrevue à La Presse après la publication aux États-Unis, par l'Académie des troubles alimentaires, d'une prise de position dénonçant le fait que beaucoup d'États ne reconnaissent pas les troubles alimentaires comme des maladies graves d'origine biologique. Le psychiatre torontois est membre de cette Académie.

Au Québec, on estime que quatre personnes sur 1000 souffriront de troubles alimentaires durant leur vie, soit 32 000 personnes au Québec.

«L'anorexie est la plus mortelle des maladies psychiatriques, tonne le Dr Woodside. Entre 15% et 20% vont mourir dans les 20 ans suivant son apparition. Si cette maladie touchait les hommes dans la soixantaine, il y aurait une clinique à chaque coin de rue. Mais notre société est discriminatoire envers les jeunes femmes et la maladie mentale. On va dire que c'est la faute des jeunes femmes, qu'elles sont obsédées par la mode. Mais la mode n'est pas une cause, elle détermine seulement les modalités de la maladie. En Chine et en Inde, par exemple, les anorexiques disent suivre des préceptes religieux qui lient le jeûne à la force spirituelle.»

En appliquant les chiffres du Dr Woodside au Québec, on peut calculer qu'une soixantaine de personnes meurent chaque année des suites de l'anorexie.