Jocelyne Poulin est sourde et aveugle, ce qui ne l'empêche pas de se définir comme une personne heureuse et épanouie. Témoignage d'une femme à la fois simple et remarquable.

Mme Poulin participait la semaine dernière au 21e Congrès mondial de Rehabilitation International qui rassemblait 850 représentants d'une cinquantaine de pays autour des droits des personnes handicapées. Et elle illustrait à merveille le pouvoir de partici­pation sociale de ces personnes lorsque les conditions sont en pla­ce pour les soutenir.

Cette Beauceronne déterminée est atteinte du syndrome d'Usher de type II, une maladie héréditaire rare qui atteint l'ouïe et la vision. Sans prothèses auditives, elle est complètement sourde. Sa vision, elle, se limite à un petit champ visuel central. Tout le champ périphérique a disparu et elle est très sensible aux éblouissements.

Préposée aux déjeuners dans un service de restauration lorsque sa maladie est apparue vers la fin de la cinquantaine, elle dit avoir bénéficié d'un très grand soutien de son patron et de ses collègues pour lui permettre de conserver son travail, ce qu'elle a fait un certain temps.

Avec sa canne blanche, raconte-t-elle, elle circulait à travers les clients, qui se montraient on ne peut plus sympathiques. Toutefois, la fatigue accumulée, combinée aux risques accrus d'accidents, l'a décidée à prendre sa retraite l'an dernier. Ce qui ne l'a pas arrêtée pour autant!

Saisir l'occasion

En fait, Jocelyne Poulin aura su saisir toutes les occasions possibles pour maintenir son autonomie. Appareil de lecture en mode audio, émetteur FM adapté pour écouter la télévision ou la radio, ordinateur pour communiquer avec ses amis ou jouer au scrabble avec des adversaires de partout dans le monde, téléphone adapté, participation aux téléphones d'amitié de l'Institut national canadien pour les aveugles sur différents thèmes, cours de natation et d'anglais, tout lui est bon pour prendre sa place dans le monde.

Au début, confesse la dame qui a maintenant 60 ans, la canne blanche ne lui plaisait guère. «Elle rendait mon handicap visible.» Mais aujourd'hui, «elle est ma meilleure amie». Elle porte aussi le macaron indiquant son double handicap, pour inciter les gens à la vigilance envers elle.

La psychologue de l'Institut de réadaptation en déficience physique de Québec (IRDPQ) Lise Côté témoigne pour sa part de la grande ouverture d'esprit de cette femme qui ne s'est pas arrêtée à ses limitations, mais a su manifester une attitude d'accueil face à tout ce qui lui était offert.

Congrès mondial

Le congrès de trois jours au Centre des congrès de Québec se concentrait sur la question des droits fondamentaux des personnes handicapées. Il y a été question de l'exercice de ces droits dans la vie de tous les jours.

Selon Richard Lavigne, conférencier et militant de longue date en faveur des droits des personnes ayant des limitations, le Québec a opéré un changement majeur au fil des ans, passant de la défense de droits particuliers à la revendication du droit à l'égalité. Un droit qui interpelle tous les acteurs et constitue un enjeu pour toute la société, dit-il.