Misère, déjà la Saint-Valentin, pensez-vous? Encore la Saint-Valentin, toujours la Saint-Valentin? Cette fête qui nous oblige à être heureux-amoureux-fleur bleue pendant 24 heures chrono, en hérisse certainement plus d'un.

La preuve: notre sondage maison réalisé auprès de 1346 internautes la semaine dernière est sans équivoque. Je dirais même limpide. Une personne sur deux trouve la fête peu importante. C'est pas clair, ça? Alors, on passe à un autre appel? Et non. Misère. Bis. Notre sondage révèle aussi qu'une personne sur deux trouve le romantisme très important. Rapport, pensez-vous? Mais c'est que tout est là, chers lecteurs. Tout! C'est même là le noeud du problème. Je vous l'annonce: nous avons une relation schizophrène face à la Saint-Valentin. Parfaitement!

En effet, s'il est facile de dire, clamer même, haut et fort, pourquoi pas, que l'on n'aime pas la Saint-Valentin, parce que la fête incarne la quintessence de la kétainitude à laquelle jamais, au grand jamais, on ne voudrait s'associer, parce que le chocolat bon marché, pas bon du tout, non merci, il suffit que le jour J, donc, lors de ce fatidique 14 février honni, la voisine de bureau, elle, reçoive un magnifique bouquet de fleur, pour que tout à coup, crac, nos grands principes s'écrasent. Et moi? J'ai pas de bouquet, moi? Pourquoi j'ai pas de bouquet, moi? Avouez... De quoi détester encore plus cette journée.

Un journaliste du Globe & Mail a sondé sa confrérie Facebook la semaine dernière, pour en avoir le coeur net, et savoir enfin si ces dames, même les plus féministes de la gang, appréciaient le romantisme, les fleurs, la courtoisie, tout ça, quoi. Et toutes le confirment: bien sûr que si! Une professeure de philosophie féministe, Amy Mullin, de l'université de Toronto, confirme d'ailleurs que la question du romantisme et du féminisme «n'intéresse plus vraiment les féministes aujourd'hui». Bref, qu'on se le dise: toutes les femmes apprécient les petits gestes. «Les gars, il est peut-être temps de ramener au gout du jour l'esprit chevaleresque», sorte d'amour courtois, version 2010, conclut donc Micah Toub, dans un papier

éloquent: «Don't sweat it guys: chivalry ain't chauvinism».

Vrai, mais pas seulement (surtout pas!) à la Saint-Valentin, rétorque Jean-Sébastien Marsan, l'auteur de l'essai Les Québécois ne veulent plus draguer, aux Éditions de l'Homme. «Les québécois ont surinvesti la Saint-Valentin, dénonce-t-il. C'est devenu trop important, parce qu¹ils sont incompétents les 365 autres jours de l'année!» Un exemple? «Je t'aime, voilà un gros coeur Jean Coutu, allons passer la soirée dans un resto dont les murs sont entièrement tapissés de Cupidons. Yé?» Euh ... non merci? Dans un monde normal, dit-il, les couples devraient profiter de «toutes les petites occasions de l'année» pour se le dire. Et quant à la Saint-Valentin, elle devrait être «réservée» aux célibataires, conclut-il.