Andréanne Parent et Julien Baillargeon sont les deux ados que toute famille aimerait avoir. Ils sont beaux, ils sont jeunes, débordants de joie de vivre et d'une sagesse surprenante. Et leur amour, qui date d'à peine un an, est frais et croquant comme une pomme qu'on vient tout juste de cueillir.

Dans la foule multicolore, et pourtant si grise, du métro de semaine, Andréanne, 16 ans, et Julien, 17 ans, sont dans leur bulle d'amoureux. Appuyés sur un mur de béton sale, ils se regardent, se taquinent, ils rient. Ils s'aiment. Ça se voit, ça se sent.

 

«C'est la première fois que c'est sérieux avec quelqu'un. C'est la première fois que je m'implique, que je fais confiance», explique Andréanne, corsage rouge et yeux en amande. Julien renchérit, vocabulaire à l'appui. «Ce n'est pas une petite relation futile.»

L'an dernier, le jour de la Saint-Valentin, Andréanne et Julien se sont parlé pour la première fois. Elle l'avait remarqué dans un cours de français. Il l'avait vue à la cafétéria. Mais, à la Saint-Valentin, elle l'a taquiné sur son chandail rouge, qui ne lui allait pas très bien.

Ce chandail rouge mal assorti leur a permis de devenir amis. Ils se sont rapidement découvert des goûts communs, des goûts assez particuliers pour des jeunes de leur âge. C'est qu'Andréanne et Julien ne sont pas des ados types. La musique qu'ils aiment? Celle de Bob Dylan, Eric Clapton, Lenny Kravitz, Fleetwood Mac. Ils aiment aussi le blues. Disons qu'on est assez loin de Lil Wayne ou Rihanna. Les films qu'ils aiment? Ceux de Sergio Leone, Stanley Kubrick, Quentin Tarantino.

«La première fois que je t'ai impressionné, c'est quand je t'ai dit que mon film préféré, c'était Kill Bill», se rappelle Andréanne. «C'est ça qui m'a attiré. Ce n'est pas fréquent», dit Julien.

Puis, en juin dernier, ils sont allés voir U2 se déchaîner en trois dimensions sur l'écran IMAX du Vieux-Port de Montréal. Le 1er juin est devenu «leur date» quand Andréanne, au son de la voix de Bono, a embrassé Julien. Signe des temps? C'est la fille qui a pris les devants. «J'étais trop con pour m'en rendre compte. J'étais gêné. Je ne savais pas trop comment m'y prendre», raconte Julien, encore intimidé par l'épisode.

Lors de cette séance de cinéma, Julien est monté dans les nuages. «Et je n'en suis toujours pas descendu.»

C'est quoi, l'amour, pour eux? «Julien a d'abord été mon meilleur ami. C'est une relation d'amitié à la base», explique Andréanne. «Parfois, il y a des gens qui sortent ensemble pour dire qu'ils ont un chum ou une blonde. Moi, je ne sors pas juste avec elle pour avoir une blonde. On s'aime pour vrai. C'est pas pour notre statut social», dit le jeune homme.

L'an prochain, les deux jeunes vont quitter le milieu douillet de la Rive-Sud et du collège Durocher pour la grande ville et le cégep du Vieux Montréal. Ils sont persuadés que leur amour va survivre à ces grandes turbulences. Où se voient-ils dans 10 ans? Mariés? Pas vraiment. «Le mariage, j'ai l'impression que c'est pour montrer aux autres que tu t'aimes», dit Andréanne. Des enfants? Comme c'est souvent le cas pour les enfants de petites familles, qui ont parfois vécu le divorce, ils en veulent, des enfants. Et pas qu'un seul.

Où seront-ils vraiment dans 10 ans? Auront-ils réalisé leurs rêves? Julien sera-t-il graphiste, Andréanne, psychologue? Aura-t-elle conservé ce teint de pêche, et lui, ces bouclettes en désordre? Habiteront-ils une petite maison de banlieue et leurs enfants courront-ils sur la pelouse? L'avenir le dira. Mais, chose certaine, ils se souviendront toute leur vie de ce premier amour enivrant, frais et croquant comme une pomme qu'on vient de cueillir.