Est-ce possible de trouver à Tremblant un restaurant raffiné abordable où l'on peut aller en famille ? C'est la question que j'ai posée à plusieurs résidants de la région récemment, gourmands et amateurs de bons vins, sachant que je ne serais peut-être pas la seule à vouloir aller dans ce coin des Laurentides cet été, histoire d'essayer la luge d'été avec les enfants, ou de faire le nouveau parcours nocturne de Moment Factory, Tonga Lumina, dans la montagne.

C'est ainsi qu'on m'a dirigée vers Le Rustique, une table installée près du pied du versant nord de Tremblant, à une quinzaine de minutes en voiture du village... mais à des lieues de son atmosphère.

Ici, en effet, on ne peut pas aller au resto en télésiège et on est chez les moustiques, les Volvo et les Subaru plus que chez les Ferrari et les BMW de course. Et si le silence est rompu, il y a plus de chance que ce soit par des oiseaux qui chantent ou des enfants qui rient que par de la musique à danser ou des amateurs de shooters s'amusant follement. À chacun son truc.

Le Rustique est un ancien motel-bar-resto des années 30, légendaire dans le coin si on se fie aux auteurs du site web de la place. L'enceinte de bois rond hyper traditionnelle de ce coin de pays a été achetée il y a quelques années par Bruno Théberge-Krivak, un chef formé à l'École hôtelière des Laurentides et qui a travaillé notamment aux Enfants Terribles à Montréal et même au Caveau, « la meilleure école », dit-il.

Au Rustique, il cherche à préparer une cuisine saisonnière, à partir d'ingrédients les plus régionaux possibles. Le chef nomme d'ailleurs les producteurs sur le menu et insiste en entrevue sur la provenance de chaque aliment. Théberge-Krivak est un gars sérieux.

Chance ou malchance ? Je me suis rendue au Rustique un jeudi, le soir où le restaurant propose une table d'hôte pas chère du tout : 49 $ pour deux personnes, soit 24,50 $ chacun, pour quatre services. Il y a alors fort peu d'options sur le menu, mais avouez que c'est un bon prix. Surtout si on veut y aller en famille, car il y a aussi un menu fixe à 10 $ pour les enfants, qui peuvent choisir entre des pâtes fraîches ou des croquettes de poulet (industrielles malheureusement, et si on se fie à un habitué de 11 ans consulté à cet égard, elles étaient bien meilleures avant quand le chef les faisait maison...).

Donc, bref, prix d'ami le jeudi, mais est-ce bon ?

Oui, car le chef cherche à respecter ses principes tout en minimisant les coûts.

Le soir où j'y suis allée, par exemple, il y avait des bouchées de thon et de saumon fumé en entrée, des petites boulettes de chair de ces poissons roulées dans les noix puis frites. Surprenant et délicieux puisque le fumé du saumon donnait à l'ensemble de jolies notes de feu de camp.

Ensuite, on proposait une soupe asiatique aux nouilles, avec de la citronnelle et un tout petit peu de canard confit. Rien de majestueux, mais un potage à la fois réconfortant et exotique, dont le bouillon avait été enrichi au lait de coco.

En plat principal, le menu proposait deux options : un burger à la viande fumée de porc de chez Gaspor, un producteur artisanal renommé des Laurentides, plat roboratif riche et satisfaisant, ou alors une assiette de turbot de la Gaspésie, un tantinet trop cuit à mon goût, et de crevettes, accompagnés d'une « salsa » de radis noirs marinés, un plat léger et savoureux, bien équilibré grâce à l'acidité et au côté épicé du concassé de bulbes.

Mais le moment fort du repas, c'était le dessert, une assiette de « s'mores » déconstruit. D'abord, l'idée est bonne puisque l'été est synonyme de guimauve grillée sur le feu, un classique estival. Ensuite, la réalisation montrait que le chef pâtissier travaille fort. Une meringue maison flambée en guise de guimauve grillée, une sauce maison au chocolat bien noir, une base de miettes de biscuits Graham figés dans l'huile de coco... Beau et franchement très, très bon.

Les enfants ont même arrêté de jouer et de courir dans le gazon tout autour de la terrasse pendant quelques secondes pour venir en manger. Vive l'été.

Prix : Entrées entre 9 $ et 15 $, plats entre 18 $ et 40 $. Les jeudis : 49 $ pour deux personnes ! Et 10 $ pour le menu pour enfants en tout temps.

Carte de vins : Courte mais soignée, la carte est composée majoritairement de produits en importation privée, d'Europe et des États-Unis avec quelques crus canadiens. Marges raisonnables.

Service : Courtois et sympathique, même en plein rush du jeudi soir, quand le restaurant a des réservations pour une vingtaine de personnes, mais que 90 se présentent... Et on fournit même le chasse-moustiques pour la terrasse si on le demande !

Ambiance : Familiale et relax, surtout le jeudi soir, le tout dans une déco rustique, façon chalet de bois rond. Le Québec traditionnel, classique, chouette. Les enfants sont vraiment les bienvenus tout comme les groupes familiaux ou amicaux disparates.

Le plus : Un chef sérieux qui met de l'avant les produits locaux et une belle grande terrasse en été.

Le moins : Pourquoi avoir arrêté de faire les croquettes de poulet maison si on prend soin de bien faire tout le reste ?

On y retourne ? Oui.

Photo Bernard Brault, La Presse

Le chef Bruno Théberge-Krivak nomme les producteurs locaux sur le menu et insiste en entrevue sur la provenance de chaque aliment.