Le vintage n'a rien de nouveau. Mais, avec la crise économique, l'arrivée de séries comme Mad Men, qui a généré un intérêt pour les pièces «rétro» issues des années 50 et 60, et la recherche par les consommateurs de pièces de qualité à caractère unique, le vintage connaît une popularité qui ne semble pas près de s'essouffler. Nous l'avons constaté à Paris, lors de la 13e édition du Salon du vintage.

C'était en grosses lettres dans le magazine Libération: le vintage est une «tendance lourde» pour 2013 en France. Alors qu'octobre engloutit avec ses vents et sa pluie la capitale française, difficile de contredire cette affirmation à la vue de la foule qui s'agglutine à l'entrée du Salon du vintage, qui a attiré 10 000 personnes cette année.Dans les 3500 m2 occupés pour l'occasion, des dizaines de stands s'entassent les uns contre les autres. D'un côté, des milliers de disques vinyles ; de l'autre, plus de 100 exposants présentant des morceaux datant des années 50 à 90. Et parmi eux, plusieurs pièces griffées.

Des robes Dior, des sacs à main Prada, des foulards Hermès, des portefeuilles Miu Miu, des lunettes de soleil Chanel : voilà les trouvailles griffées que s'arrachent les modeuses parisiennes au Salon. Et la compétition pour dénicher la pièce la plus rare et la mieux conservée est féroce.

Dans un monde où les vêtements à bas prix pullulent, où une mode est vite remplacée par une autre et où il n'est plus rare de croiser une personne vêtue du même morceau que nous, le vintage de luxe se poserait-il en rempart contre la fast fashion? Le nec plus ultra, aujourd'hui, serait-il de réussir à trouver ce morceau que nul autre n'a ?

C'est ainsi du moins que Didier Ludot, qui a présenté cette année au Salon du vintage une exposition consacrée aux collections Yves Saint Laurent Haute Couture des années 60 à 2000 (dont les pièces étaient tirées de sa collection personnelle), explique l'engouement pour les pièces griffées vintage: «Les femmes achètent du vintage haute couture pour avoir une pièce unique, rare. Déjà, à l'époque, ces pièces ont été produites à très peu d'exemplaires. De plus, ce sont des pièces faites entièrement à la main; il y a donc là un côté artisanal, un patrimoine culturel aussi.»

L'homme, qui est souvent présenté comme l'instigateur du vintage en France, tient sa boutique dépôt-vente au Palais Royal depuis 1975. Il y vend, à une clientèle avertie composée de collectionneurs, de stylistes et d'actrices, des morceaux griffés uniques, comme ce superbe tailleur Chanel des années 40 qui se détaillait 1200 euros lors de notre passage.

Pour ces femmes, la question de savoir si ces morceaux des années 40, 50 ou 60 sont «à la mode» ne se pose même pas, croit M. Ludot. «À partir du moment où une femme tombe amoureuse d'un vêtement vintage haute couture, elle ne se demande pas si c'est démodé ou non. Elle aime le vêtement et l'assume complètement lorsqu'elle le porte. En un sens, ces morceaux sont donc intemporels.»

À la recherche du bon cru

Pour Didier Ludot, le terme «vintage» est symbole d'excellence et de rareté, même s'il est aujourd'hui utilisé à toutes les sauces. «Au départ, le vintage était un terme élitiste. Il a d'abord été utilisé en oenologie pour désigner un grand cru. Aujourd'hui, c'est un terme un peu galvaudé; au supermarché, il y a même de la moutarde vintage! C'est un peu dommage», déplore-t-il.

Si se payer un Dior ou un Prada est inaccessible pour le commun des mortels, dénicher une de leurs pièces griffées d'antan peut être une façon de porter de la haute couture sans se ruiner. Mais, davantage que la recherche d'aubaines, c'est la quête du morceau unique et de qualité qui mène le marché du vintage de luxe.

En fait, le vêtement vintage a une valeur aux yeux de plusieurs car il porte en lui une histoire, un héritage... et est synonyme de qualité. Et pour ça, plusieurs sont prêts à payer le fort prix. «Les gens veulent se raccrocher aux vraies valeurs et avoir des pièces importantes; ça les rassure, dans un sens. Et puis, c'est un peu une lutte contre la consommation et tous ces vêtements qu'on retrouve partout, dans toutes les grandes capitales», souligne le collectionneur.