Les vieux films noirs américains et les atmosphères hitchcockiennes ont inspiré les couturiers milanais en ce premier jour de défilés des collections de prêt-à-porter pour l'automne/hiver 2013-14, avec des femmes fatales à l'élégance sophistiquée.

C'est Gucci qui a ouvert le bal sous l'oeil attentif de François-Henri Pinault, le PDG du groupe PPR, qui assistait pour la première fois à un défilé de la griffe italienne avec sa femme, l'actrice Salma Hayek.

Pour l'hiver prochain, la styliste Frida Giannini propose une «dark lady» vêtue essentiellement de noir et de couleurs sombres (pourpre, lie de vin, rouille). Perchée sur des talons aiguilles vertigineux dans de longues bottes en python, gantée de cuir, elle laisse entrevoir des bas résille par une fente s'ouvrant dans le bas d'une robe.

Les mannequins portent des tailleurs rigoureux, la jupe tombant sur le genou, dans des matières ultra luxueuses: en fourrure de mouton de Perse, en poulain ou encore en cuir effet craquant. Épaules et taille sont mises en valeur par des volumes, tandis que des feuilles de fougère façon tapisserie enrichissent manches et flancs des robes ou des manteaux.

Pour cette femme fatale un brin agressive, pas de chemisiers, mais des hauts à col roulé en cuir ou latex. Ailleurs les cols sont montants et cachent toujours le cou pour un look plus austère. Les motifs classiques tels le pied de poule ou le Prince de Galles sont revisités à travers des traitements innovants: agrandis et reproduits comme des photos imprimées sur de la soie ou brodés avec un fil de lurex pour illuminer une robe en cuir.

Le soir, la femme Gucci se transforme en oiseau de nuit avec de somptueuses robes en satin incrustées de pierres et brodées de plumes multicolores.

Séquence frissons également chez Frankie Morello où défilent de grandes blondes fatales à l'allure glaciale à la Kim Novak. Gants de cuir froncés sur le poignet, chaussant de hauts talons en velours rouge, elles cachent leur regard derrière de petites lunettes noires rondes ou derrière la visière gigantesque d'une casquette.

Les jupes descendent droites jusqu'aux mollets, portées sous un large pull tricoté en torsades, serré à la taille par une fine ceinture, avec un look très années 1950. Des blousons jacquard en tissu damassé grenat s'enfilent sur des micro shorts-culottes. Des motifs abstraits rouge vif éclatent comme des feux d'artifice sur les tissus noirs ou scintillants.

La femme mystérieuse dessinée par le duo Pierfrancesco Gigliotti et Maurizio Modica se fait encore plus troublante à la tombée du jour avec d'interminables robes noires éclaboussées de bouts de miroirs brisés étincelantes de reflets aveuglants.

Alberta Ferretti opte quant à elle pour une élégance simple, mais qui cache là aussi un côté secret et extrêmement sophistiqué. Une robe en feutre d'un rouge pompéien aux lignes épurées est décorée de broderies tridimensionnelles. Un tissu en dentelle se devine sous une robe en chiffon.

Ses mannequins âgées au plus de 16-17 ans semblent des jeunes filles issues de la vieille aristocratie, qui scellent sous leur allure fragile une force insoupçonnable, voire un caractère un brin martial. Comme en témoignent les manteaux «Directoire» un peu bouffants sur le derrière ou cette veste-uniforme toute brodée de strass et de pierres à porter le soir.

La créatrice alterne entre deux silhouettes. L'une très courte avec des jupettes plissées ou composées de multi-strates de tulle et de voile se portant avec des chaussures plates. L'autre proposant des longueurs maxi avec d'élégantes mules à talon.

Une chemise en crêpe blanche accompagne une longue jupe noire en drap de laine. Une robe en velours violet, juste nouée à la taille par un ruban, tombe jusqu'aux pieds dans une simplicité époustouflante. Ainsi parées, ces demoiselles de bonne famille nous renvoient au début du siècle dernier. Mais sans nostalgie. En guise de bijoux, elles portent toutes la croix du mérite en boucles d'oreilles … «parce que les femmes le méritent !», justifie Alberta Ferretti dans un large sourire.