Jean-Paul Gaultier a pensé aux femmes «qui ne veulent pas ressembler à leurs filles de 20 ans» pour sa collection «anti-jeunisme» présentée samedi soir au cinquième jour de la Fashion week parisienne.

Travaillant sur des «clichés d'élégance un peu passéistes», avec une bande-son datée des années 1960 mixant la voix de la comédienne Delphine Seyrig, il a souhaité «redessiner une image dans les mémoires avec des matériaux et des effets d'aujourd'hui», a-t-il expliqué en coulisses.

Usant de trompe-l'oeil et de superpositions, il a décidé, pour une fois, de «ne pas montrer le corps». Et de brouiller la ligne entre les tenues de jour et celles réservées au soir.

Seyrig, dont on entendait sur scène le dialogue avec Jean-Pierre Léaud dans le mythique magasin de chaussures du film Baisers volés de François Truffaut, est l'archétype de la «femme sensuelle, séduisante qui n'est pas une gamine, c'est exactement la femme que je veux montrer».

La cible de cette collection de prêt-à-porter de luxe pour l'hiver prochain, c'est une «bourgeoise sans âge», souffle encore son entourage.

Le couturier a fait appel à Valérie Lemercier, connue pour ses rôles comiques au cinéma, pour jouer la vedette de son défilé. Apparaissant drolatique et belle à la fois, avec une énorme coiffure gonflée, elle campe parfaitement, aux yeux du créateur, «la Parisienne fofolle et légère en apparence, qui donne cette impression de facilité et de joie».

Les modèles, coiffés de chignons volumineux souvent gris, se dévêtaient lentement en défilant sur le podium, pour jeter au pied des photographes un foulard ou une veste, avant de repartir vers la scène, leur tenue modifiée. Certaines revenaient le manteau sur l'épaule, ou sous le bras, pour révéler un tailleur ou une robe en-dessous. D'autres enlevaient une jupe ou un smoking, dévoilant une combinaison pantalon soyeuse.

Parmi elles, un homme, le tout jeune mannequin australien Andrej Pejic, à la beauté troublante, s'était glissé quasi incognito tant son physique est androgyne.

La cinéaste Tonie Marshall mais aussi la starlette américaine Nicole Richie, au premier rang, ont pu admirer la coupe précise des trenchs et autres tailleurs pantalons dans un défilé dominé par les couleurs sombres, à l'exception de chemisiers ou combinaisons en jaune ou rouge vifs.

La collection fait une grande place aux matières brillantes, mais aussi à la fourrure, comme ces doudounes noires sur le buste prolongées de renard autour du col et au niveau de la jupe.

Une quarantaine de militants anti-fourrure étaient d'ailleurs rassemblés dans la soirée devant le siège de la maison Gaultier, où se tenait le défilé, scandant «Gaultier assassin» ou «fourrure ordure». La manifestation, rituelle, est presque devenue une tradition de la Fashion week parisienne.