Les créations de la griffe québécoise Barilà pourraient se promener un peu partout en Amérique du Nord. Non pas sur les passerelles de Bryant Park ou dans les boutiques branchées, mais plutôt sur les chanteurs et chanteuses de l'opéra Werther, de Jules Massenet. L'Opéra de Montréal, qui détient les droits de la production pour le continent, a retenu les services des soeurs Barilà pour concevoir les costumes.

«Nous avons acheté cette production australienne qui venait intentionnellement sans costumes. Ceux-ci devaient être dessinés par un designer de la ville dans laquelle la production était présentée. C'était le concept», explique Michel Beaulac.

Le choix du directeur artistique de l'Opéra de Montréal, qui fréquente assidûment les événements de mode, s'est arrêté sur Barilà, une griffe qu'il qualifie de «très moderne».

Cela dit, ce n'est pas cette «modernité», ni l'esprit «rock» et «glam» des soeurs Barilà qui se retrouveront sur scène, à la Place-des-Arts, dès demain et jusqu'au 3 février. «Par son aspect visuel, la scénographie est très souple. Elle permet d'adapter les costumes à toutes sortes d'époques et de styles. Il y a eu les années 50 et le Paris du début du XXe siècle. Comme c'est une production très élégante, ça nous a rappelé les demeures de villégiature des années 20 en Nouvelle-Angleterre, à la Great Gatsby. Nous avons donc opté pour des costumes évoquant cette époque et cet univers.»

Illustration fournie par Sabrina Barilà

Sabrina Barilà, la designer du tandem quelle forme avec sa soeur Claudia, n'a pas eu de mal à se laisser imprégner par l'ambiance des années folles, ses tenues exotiques, japonisantes, la grande féminité des toilettes pour dames et la masculinité bien affirmée des hommes.

Un peu moins expérimentée côté mode masculine, Sabrina s'est assuré la collaboration de son patroniste, AnthonyKai, afin qu'il l'aide avec les costumes pour messieurs.

Ayant étudié le design de mode, Sabrina n'avait jamais pensé faire du costume. Elle a pourtant eu la piqûre. «C'est très différent de la collection de prêt-à-porter. On travaille en fonction d'un personnage. Tout est fait en pièce unique, à la main, ce qui donne beaucoup de liberté sur le plan de la complexité du vêtement. Je peux faire ce que je veux et employer tous les moyens nécessaires pour que ça ressemble à ce que j'avais dessiné au départ! En prêt-à-porter, je suis toujours très limitée par la confection et la production, étapes pendant lesquelles tout peut déraper.»

Illustration fournie par Sabrina Barilà

Michel Beaulac, pour sa part, voit une certaine parenté entre l'univers de la mode et celui de l'opéra. «Ce sont des mondes où on travaille dans l'urgence. Les deux demandent un grand oubli de soi. Il faut constamment penser au produit fini, à l'impact qu'il aura sur la scène ou sur la passerelle. Puis la collaboration et la confiance entre les différentes équipes sont primordiales.»

Le directeur artistique, qui s'est donné la mission personnelle de mettre en valeur les artistes et créateurs d'ici, n'a pas fini de créer des mariages féconds. Quant à Sabrina Barilà, elle travaille pour l'instant (dans l'urgence!) sur sa collection automne-hiver 2011-2012, qui sera présentée à la Semaine de mode de Montréal du 7 au 10 février.

Illustration fournie par Sabrina Barilà