Alexandre Vauthier part en scooter récupérer des cintres ou les broderies pour son prochain défilé: A 39 ans, ce couturier français, déjà repéré par la star américaine Rihanna, n'attend aucune aide pour percer.

«Je bosse, je bosse. D'ailleurs je ne fais que ça. Mais ça avance», répète invariablement cet ancien des maisons Mugler et Jean Paul Gaultier, crâne ras et barbe de plusieurs jours, souvent en jean.

Il a présenté sa quatrième collection à l'Institut du monde arabe à Paris lundi soir, en dehors du calendrier officiel de la couture. Quelques jours plus tôt, il recevait avec son équipe les mannequins pour le casting.

Des jeunes filles immenses attendent leur tour dans l'escalier, déchaussant leurs tennis pour enfiler des talons vertigineux. «Ça améliore tes chances», explique l'une d'elles.

Elles passent d'abord devant la directrice de casting, avant d'essayer plusieurs tenues dans le dressing qui contient les 22 looks du défilé. Des manteaux en plumes d'autruche, une combinaison en renard rasé, des pantalons stretch en velours et des ensembles aux grandes manches en voile mousseline.

«Je fais travailler les artisans, Lesage pour la broderie, le plumassier Lemarié et le bijoutier Goossens», qui fournit de larges bracelets en or figurant un V pour Vauthier, explique Alexandre, enthousiaste malgré la fournaise et la fatigue.

Cette collection en noir, blanc, or et violet, tranche avec les précédentes, aux épaulettes très marquées. Ses formes sont plus géométriques, la silhouette a changé même si le style reste sexy, avec des décolletés en V profonds et de nombreuses mini-robes.

La location d'une salle pour défiler à Paris reste très onéreuse: Il faut compter entre 10.000 à 15.000 euros le défilé. «Il n'y a pas d'endroits abordables pour les jeunes maisons», explique son attaché de presse.

Mais sans défilé, point de salut si l'on veut se faire connaître et «grossir un peu» chaque saison.

Après le deuxième défilé, il y a un an, la styliste de Madonna avait fait venir toute la collection au Crillon. La star américaine avait choisi une mi-robe mi-combinaison strassée en jersey de soie.

Ensuite, le nom du couturier a circulé. Désormais, il habille régulièrement la chanteuse Rihanna, pour laquelle il a même conçu des costumes de scène incorporant de petites lumières. Et le Bon Marché, grand magasin parisien, propose une partie de ses collections à ses clientes.

Déçu de n'avoir pas remporté la semaine dernière le concours de l'Andam, dont il était finaliste et qui offre 220.000 euros pour lancer de jeunes créateurs français ou installés en France, Alexandre Vauthier espère un jour intégrer le club exclusif de la couture pour défiler dans le calendrier officiel.

En France, la «haute couture» est une appellation juridiquement protégée qui répond à certains critères, notamment en termes de pièces uniques sur mesure ou du nombre d'employés. Tous les six mois, les maisons bénéficiant de l'appellation se réunissent pour décider d'autoriser un styliste à défiler comme invité.