La semaine s'annonce décisive pour la maison de couture Christian Lacroix, placée en redressement judiciaire début juin, les éventuels candidats à sa reprise devant déposer leur offre au plus tard lundi.

L'administrateur judiciaire chargé du dossier, Régis Valliot, a reçu plusieurs«marques d'intérêt» pour la reprise de la griffe, dont celle de la société de conseil Bernard Krief Consulting (BKC), a-t-on indiqué à son cabinet.Outre BKC, deux autres repreneurs potentiels se sont manifestés, «dont un fournisseur», a indiqué à l'AFP Guillaume Martin, du cabinet d'expertise Méric et Associés, désigné par le comité d'entreprise (CE) de Christian Lacroix SNC.

Selon un membre du CE, qui a souhaité garder l'anonymat, «beaucoup de dossiers ont été retirés auprès de l'administrateur judiciaire».

Créée en 1987 avec l'appui du numéro un mondial du luxe LVMH qui l'a vendue en 2005 au groupe américain Falic, spécialisé dans le duty free, la maison Christian Lacroix a enregistré l'an dernier 10 millions d'euros de pertes, pour un chiffre d'affaires de 30 millions d'euros. Elle compte 125 salariés. Le plan social prévoit la suppression de 112 emplois.

Le comité d'entreprise doit se réunir une nouvelle fois mardi après-midi.

Le précédent du CE, mercredi, avait notamment entendu les conclusions du cabinet Méric et Associés.

Les experts plaident pour un prêt-à-porter haut de gamme et non pas de luxe, au côté de la haute couture, avec des collections intemporelles et une distribution recentrée sur un nombre de marchés restreint.

«La haute couture, ça perd de l'argent, c'est le budget de communication de la marque», explique M. Martin. «Derrière, si vous n'assurez pas des lignes de produits qui rencontrent un succès commercial, vous n'arrivez jamais à amortir le choc et à tirer bénéfice de votre investissement en termes de création.»

Selon l'expert, des coûts «ont dérapé» et ils «peuvent être réduits assez sévèrement» pour diminuer le déficit et «donner du sens à la déclinaison en prêt-à-porter haut de gamme». A condition de ne pas «repartir tous azimuts», mais de «recapitaliser sur les vrais acquis de la présence de la marque sur certains marchés».

Le cabinet préconise aussi une «interpellation du pouvoir politique» car avec Christian Lacroix, «on touche quand même au patrimoine culturel français», estime M. Martin, en regrettant qu'«il n'y ait pas eu de mobilisation d'autres groupes de luxe» comme PPR (Gucci, Yves Saint Laurent, Balenciaga, Boucheron...) ou Hermès.

Christian Lacroix a déjeuné vendredi avec le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand, mais rien n'a filtré de cet entretien.

M. Mitterrand avait exprimé début juillet sa volonté de «contribuer à trouver une solution» pour la maison de couture, estimant que sa disparition serait «un désastre culturel».

Les salariés, quant à eux, «ne bougent pas, ils sont plutôt fatalistes», constate un membre du CE. La mobilisation, «ce n'est pas dans la culture de l'entreprise», qui ne compte pas de syndicat, explique-t-il. Les salariés «ont gagné un mois, parce que normalement les lettres (de licenciement) auraient dû partir fin juillet», ajoute-t-il. Mais «ils s'attendent à recevoir leur lettre au retour des vacances et à ne plus revenir dans l'entreprise».