Le designer québécois Jean-Claude Poitras en a assez de s'excuser auprès des gens qui dénoncent avec raison l'extrême maigreur dans le milieu de la mode.

Le Dr Howard Steiger, de l'Institut Douglas, est persuadé que les publicités de femmes anormalement minces peuvent déclencher l'anorexie chez les jeunes filles vulnérables. La journaliste Esther Bégin, elle, déplore que 60% des adolescentes n'aiment pas leur silhouette.

 

Chacun a sa motivation pour souhaiter que les critères actuels de beauté changent. Mais tous trois ont maintenant une mission commune: faire partie d'un comité qui aura le mandat de s'attaquer au problème.

La ministre de la Condition féminine, Christine St-Pierre, a annoncé hier la formation d'un comité qui devra élaborer une «charte d'engagement volontaire» pour «contrer l'extrême maigreur» et «promouvoir une image corporelle saine». Le groupe de travail est composé d'une trentaine d'acteurs issus des industries de la mode, de la publicité et des médias.

Christine St-Pierre pose ainsi la première pierre de ce projet dont elle parle depuis l'été dernier. Les signataires de la charte, qui sera publiée l'automne prochain, s'engageront sur une base volontaire à ne plus présenter la maigreur extrême et à faire la promotion de la «diversité corporelle».

Le gouvernement provincial s'inspire de la France, où une charte semblable a été adoptée en avril dernier. Il souhaite aussi répondre aux démarches de deux jeunes filles venues porter des pétitions à l'Assemblée nationale, l'an dernier, pour dénoncer le culte de la maigreur.

«Nous avons le devoir d'agir pour mettre en échec les stéréotypes de beauté liés à la minceur excessive», a déclaré Christine St-Pierre, qui a fait son annonce au marché Bonsecours où se tient cette semaine la Semaine de mode Montréal.

Le comité, qui se rencontrera pour la première fois le 21 avril, est présidé par la journaliste Esther Bégin et le Dr Howard Steiger, chef du Programme des troubles de l'alimentation de l'Institut universitaire en santé mentale Douglas. «La pression socioculturelle de faire un régime est un élément dangereux pour les personnes vulnérables aux troubles alimentaires», a dit le Dr Steiger.

La critique péquiste en matière de Condition féminine, Carole Poirier, a convenu qu'il y avait un «problème avec la maigreur dans le milieu de la mode». Mais selon elle, l'initiative du gouvernement ne va pas assez loin. «La charte ne sera encadrée par aucune loi, a-t-elle souligné. C'est un voeu, au fond. Et on espère que le monde de la mode et des médias suivront.»

Dans les pays industrialisés, 3% des jeunes femmes souffrent de troubles alimentaires sévères, et 10% sont constamment préoccupées par leur poids, selon les données du Dr Steiger.