C'est difficile de croire qu'un restaurant aussi minuscule qu'Edgar, à Gatineau, réussisse à servir plus de 150 assiettes de brunch par journée de week-end, tout en vendant une centaine de sandwichs aux cyclistes affamés. Qu'est-ce qui fait courir les foules ici depuis sept ans? C'est la cuisine franchement gourmande de Marysol Foucault.

Tout aussi lilliputienne que son restaurant, la chef n'en est pas moins armée d'une vigueur hors du commun. «Mighty/Mouse», dit son compte Instagram. Un simple coup d'oeil à l'ardoise et au comptoir à desserts confirme qu'elle ne manque pas non plus d'inspiration. De plus, ses appétissants menus Zeste ont égayé la chaîne «100 % bouffe» la saison dernière.

Il faut dire que la «super souris» avait cumulé plusieurs expériences de travail avant d'ouvrir sa propre table de jour. On peut dire qu'elle avait bien fait ses classes, en travaillant entre autres au Twist (aujourd'hui occupé par le bar à vin Soif), puis dans trois institutions du Vieux-Hull: Aux 4 jeudis, Pizza'za et le défunt Bistro 1908.

C'est dans un café du village Old Chelsea qu'elle a vu le potentiel du potager, pour apporter fraîcheur et variété à la table. L'idée de faire pousser une partie de ses ingrédients ne l'a jamais quittée.

Puis, à un moment donné, elle en a eu ras le bol de travailler pour les autres. Au hasard d'une promenade avec son amoureux, Marysol est passée devant un petit local vacant du quartier Val-Tétreau. «C'était tellement petit et pas cher que je ne prenais pas un gros risque.» Edgar serait ouvert de jour seulement, du mardi au dimanche.

Puis les premiers clients sont venus: des curieux du quartier, des cyclistes passant par la piste voisine. Après, ils sont venus de plus loin. Et aujourd'hui, la fin de semaine, les brunchs se déroulent dans une cacophonie bilingue. Les trois quarts des clients proviennent de l'autre côté de la rivière des Outaouais.

Marysol et son équipe ne sont pas peu fiers d'avoir réussi leur pari de proposer un menu qui change pratiquement du tout au tout chaque semaine. Ce n'était pas évident d'implanter un concept pareil au coeur d'un quartier résidentiel au passé ouvrier.

Certes, il y a quelques classiques. La crêpe soufflée («Dutch baby»), par exemple, est souvent là, mais avec des garnitures variées. Les oeufs sont omniprésents. Le bel assortiment de desserts vous donnera inévitablement des yeux plus grands que la panse.

Edgar, enfant unique

Forte de son succès, la chef s'est lancée dans l'aventure de la restauration de soir, avec Odile. Ce fut un joli succès. Mais, deux ans plus tard, en 2013, la grande soeur d'Edgar a tiré sa révérence. Travailler 100 heures par semaine, non merci! a décidé la rouquine qui avait perdu de son pep. Elle est donc revenue à chouchouter son petit commerce de poche, rue Bégin. Il n'est pas dit que le service du souper ne reprendra pas un jour. Marysol rêve de refaire des assiettes du soir et de monter une belle cave à vin.

En attendant, elle est fort occupée à préparer son potager annuel. L'été, les bacs de l'entrée et le toit du garage contigu au restaurant se remplissent de plants de tomates, d'herbes, de laitues, d'aubergines, de céleris-raves et... de radis!

Reste que son modeste jardin ne suffit évidemment pas à nourrir les centaines de clients qui passent chez Edgar chaque semaine. La restauratrice demeure fidèle à ses fournisseurs préférés, dont les cueilleurs et cultivateurs de champignons du Coprin («le bijou de notre région»), puis les fermes Bergeron, Rochon et Lève-Tôt. Les poissons et fruits de mer issus de la pêche durable proviennent de Whalesbone, à Ottawa, qui possède aujourd'hui une poissonnerie, deux restaurants, une taverne gourmande et un service de traiteur.

Bref, Edgar est un petit restaurant qui en mène large dans sa jolie communauté.

Photo Bernard Brault, La Presse

Marysol Foucault et son équipe ne sont pas peu fiers d'avoir réussi leur pari de proposer un menu qui change pratiquement du tout au tout chaque semaine.